
Martin Trépanier au coeur de la plantation d'argousier située au nord-ouest du campus
— Marc Robitaille
«Certains producteurs québécois se sont lancés dans la culture de l’argousier en pensant qu’ils pourraient faire de l’argent facilement, mais le problème est qu’il n’y a pas eu suffisamment d’efforts du côté de la mise en marché. Les transformateurs alimentaires et la population ne connaissent pas ce fruit alors les débouchés sont encore rares ici», analyse Martin Trépanier, professionnel de recherche au Département de phytologie.
La culture de l’argousier n’a commencé qu’en 1998 au Québec, mais déjà 70 000 plants ont été mis en terre aux quatre coins de la province. Depuis 2004, grâce à l’appui financier de l’Association des producteurs d'argousier du Québec et de Développement économique Canada, le professeur Jacques-André Rioux, du Département de phytologie, a déployé un réseau d'essais de cultivars d'argousier au Québec, afin de trouver des variétés particulièrement bien adaptées à notre territoire. L’un de ces sites se trouve sur le campus, au nord du jardin Van den Hende, sur les parcelles expérimentales de la Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation. «Nous testons 40 cultivars d’argousier en provenance de différents pays», précise Martin Trépanier.
Quelques irritants
L’argousier n’a pas que des qualités, il faut le reconnaître. Son fruit, très acide, ne séduit pas spontanément le palais. La cueillette des baies, qui ont moins d’un centimètre de longueur, pose aussi problème: le fruit est solidement attaché aux tiges, mais sa peau est fragile, de sorte qu’il éclate facilement entre les doigts du cueilleur. Pour compléter le tableau, plusieurs variétés ont des épines sournoisement dissimulées dans le feuillage. «La meilleure façon de récolter les baies d’argousier est de tailler les branches et de les congeler, explique Martin Trépanier. On peut ensuite détacher les fruits avec un simple jet d’air.»
Ces particularités de l’arbuste augmentent toutefois les coûts de la récolte. «Malgré l’intérêt croissant pour l’argousier et le potentiel de commercialisation des produits dérivés de ses fruits, le coût des baies d’argousier est relativement élevé, constate Christina Ratti, professeure au Département des sols et du génie agroalimentaire. Pour que l’industrie des produits transformés de l’argousier soit rentable, il faudrait viser tout particulièrement les produits de très haute valeur ajoutée, comme les aliments fonctionnels et les nutraceutiques», estime-t-elle.
La professeure Ratti a d’ailleurs mis au point un procédé de fabrication de poudre pure de baie d’argousier qui conserve pratiquement toutes les propriétés nutritives du fruit. «Les poudres que nous obtenons sont riches en composés bioactifs et elles se conservent longtemps à la température de la pièce», souligne-t-elle. On pourrait les utiliser pour fabriquer des suppléments alimentaires ou d’autres produits comme des crèmes, des savons ou des lotions, ou encore les intégrer à des jus, des céréales, des desserts ou des recettes. «Avant d’en arriver là, il faudra toutefois développer le marché en faisant mieux connaître les propriétés de l’argousier», conclut-elle.