Dès le début de la performance, la bande-son met l’accent sur la visite d’un homme dans un musée qui concentre son attention sur un petit pan de mur jaune alors qu’il va voir une toile du peintre hollandais Vermeer. Ce personnage va ensuite souffrir physiquement, ce que traduit gestuellement Ludovic Fouquet en tombant devant un des tableaux. Un geste repris ensuite par les autres étudiants, de différentes façons, donnant corps aux émotions qui peuvent assaillir les spectateurs à la vue d’une peinture. Composée en grande partie autour d’un texte du professeur portant sur l’observation d’une peinture et de ses détails, la performance illustre des concepts la plupart du temps purement théoriques. La coexistence d’images filmées en transparence attire l’œil sur les coulisses de peinture sur la toile, ou encore sur les esquisses de silhouettes qu’on y trouve. La simple utilisation d’objets au sol rappelle aussi les lignes directrices traversant le tableau, tout comme les pas jaunes laissés par Jessica Morin dans la salle.
«En regardant le tableau, en faisant des gestes qui reproduisent ses lignes principales, on a vraiment l’impression de faire partie de la toile, raconte cette étudiante de première année au baccalauréat en arts plastiques. Dans cette improvisation, je me sens un peu comme Mary Poppins lorsqu’elle saute dans le tableau peint sur le trottoir…» La magie de l’exercice séduit également Nicole Malenfant, responsable du certificat en art et science de l’animation interactive. «En proposant un cours comme Arts visuels et expérimentation théâtrale, l’École des arts visuels s’ouvre à un nouveau champ de l’expérimentation visuelle, explique la professeure, et tisse des liens avec le théâtre comme peut le faire un laboratoire comme le LANTISS, le Laboratoire des nouvelles technologies de l’image, de la scène et du son. C’est une autre manière d’approcher le mouvement et de prendre conscience du regard des étudiants sur l’art.»
Une analyse que partage le concepteur du cours, Ludovic Fouquet, qui a monté la performance en une poignée d’heures avec les étudiants. Touché par les tableaux de grande dimension d’Isabelle Dubois, il a laissé son imagination explorer la manière de tisser des liens physiques avec l’image. «Ses toiles sont vraiment à échelle humaine; elles permettent de travailler avec des silhouettes comme si elles allaient s’imprégner sur le tableau, raconte l’enseignant, également critique d’art et commissaire d’exposition. En fait, la performance permet de s’arrêter devant l’œuvre, de la faire résonner. Pendant un temps, le tableau devient volume.»