
Sept chercheurs, rattachés aux Facultés de médecine de l'Université Laval et de l'Université de Montréal, ont passé en revue les dossiers de patientes qui, après avoir subi une césarienne lors d'un accouchement, ont tenté d'accoucher par voie vaginale lors d'une grossesse subséquente. Ces accouchements se sont déroulés entre janvier 1987 et décembre 2004 à l'Hôpital Sainte-Justine de Montréal. Les résultats des analyses révèlent un lien étroit entre le poids du bébé et les tentatives infructueuses d'accouchement vaginal. Lorsque le poids de l'enfant dépasse 4 kg, l'accouchement se termine par une nouvelle césarienne dans 38 % des cas, soit deux fois plus souvent que lorsque l'enfant pèse moins de 3,5 kg.
Les chercheurs ont établi que les risques de rupture de l'utérus, de déchirement grave du périnée et de recours à la césarienne sont environ 2,5 fois plus élevés lorsque le poids de l'enfant dépasse 4 kg que lorsqu'il est sous les 3,5 kg. Quant au risque de dystocie des épaules — la tête de l'enfant est sortie, mais ses épaules sont bloquées —, il est 25 fois plus élevé. Tous ces facteurs de risques sont intermédiaires pour les bébés pesant entre 3,5 et 4 kg.
«Nos résultats indiquent que le poids estimé du bébé à la naissance constitue un élément important à considérer pour les femmes qui ont déjà eu une césarienne et qui envisagent d'accoucher par voie vaginale. Les médecins et les femmes enceintes doivent en tenir compte dans leurs discussions, souligne Emmanuel Bujold. Je déconseille l'accouchement vaginal à la plupart des patientes qui ont déjà eu une césarienne et qui attendent un bébé de plus de 4 kg.» Ces cas ne sont pas exceptionnels. Dans la présente étude, ils constituent 10 % des naissances.
Le taux de césarienne est en hausse dans le monde depuis quelques décennies, notamment au Canada où il se situe maintenant à 26 %. Quant au taux d'accouchement vaginal après césarienne, il est en déclin parce que les médecins craignent les complications. «Pourtant, un nombre croissant d’études indiquent que la césarienne entraîne plus de problèmes que les accouchements vaginaux pour la mère et l’enfant, souligne Emmanuel Bujold. C’est pourquoi il est important de pouvoir déterminer si une patiente qui a déjà eu une césarienne peut avoir un accouchement vaginal sécuritaire.»
Il y a un an, le professeur Bujold et son équipe rendaient publique une étude qui liait certaines caractéristiques de la cicatrice laissée par une césarienne au risque de complications lors d'un accouchement vaginal subséquent. Les IRSC viennent de lui accorder 370 000 $ pour déterminer si l'estimation échographique de l'épaisseur de la paroi utérine et du poids du bébé conduit à des décisions qui abaissent significativement les risques liés à l'accouchement vaginal après césarienne. Pour mener à bien cette étude, le professeur Bujold et ses collaborateurs recruteront 1500 femmes à Québec, Montréal et Sherbrooke.
L'article paru dans Obstetrics & Gynecology est signé par Nicole Jastrow, Stéphanie Roberge, Robert J. Gauthier, Liny Laroche, Louise Duperron, Normand Brassard et Emmanuel Bujold.