
En théorie, les sportifs qui participent à des épreuves intenses de moins de 2 minutes, comme le 800 mètres, pourraient profiter de la neurostimulation électrique transcutanée. La preuve scientifique reste toutefois à faire, notamment chez les athlètes d'élite.
— Pierre-Yves Beaudouin / Wikimedia
La technique en question se nomme neurostimulation électrique transcutanée, communément désignée sous son acronyme anglais TENS. Elle repose sur l'administration d'une stimulation électrique de faible intensité à l'aide d'électrodes placées à la surface de la peau. «L'intensité n'est pas assez élevée pour provoquer une contraction musculaire visible, souligne le professeur Billaut. Par contre, elle est suffisante pour atténuer la transmission des signaux de douleur, comme le font certains médicaments analgésiques.»
C'est en considérant cette action antidouleur que le professeur Billaut et ses collaborateurs australiens, Andrew W. Hibbert, Matthew C. Varley et Remco C. J. Polman de la Victoria University, se sont demandé si une séance de TENS avant une épreuve sportive pouvait avoir un effet sur les performances des participants. «Dans des épreuves de type contre-la-montre, la performance dépend de la capacité à maintenir un effort très intense en dépit des signaux de douleur que les muscles envoient au cerveau.»
Pour tirer la question au clair, les chercheurs ont recruté 13 sportifs occasionnels qui ont accepté de participer à trois contre-la-montre de 5 km sur vélo stationnaire. Au moins deux jours de repos étaient alloués aux participants entre chaque séance. Dans les 30 minutes précédant un test, les participants étaient soumis soit à une véritable séance de TENS au cours de laquelle les électrodes étaient appliquées sur leurs quadriceps, soit à une séance simulée de TENS, c'est-à-dire sans courant électrique. Lors de l'autre séance (témoin), les sujets effectuaient un contre-la-montre sans séance préalable de TENS ou de TENS simulée.
Les résultats indiquent que, pour l'ensemble des participants, l'application de TENS n'a pas eu d'effet sur le temps enregistré sur 5 km ni sur la douleur perçue pendant le test. Par contre, une tendance très nette se dégage: après la séance de TENS, 9 des 13 participants ont augmenté la puissance produite pendant le premier kilomètre et ils ont abaissé leur temps de passage sur cette distance, comparativement à la séance témoin. «L'application d'une stimulation électrique semble procurer des bénéfices se limitant aux deux premières minutes, alors que la douleur induite par l'exercice est encore localisée, observe le professeur Billaut. L'effet analgésique produit par la TENS ne semble toutefois pas en mesure de contrer la montée de la douleur qui se manifeste subséquemment pendant le contre-la-montre ainsi que les autres facteurs influençant la performance.»
À la lumière de cette étude et d'autres données probantes de la littérature scientifique, François Billaut n'hésiterait pas à prescrire des séances de TENS avant des épreuves de courte durée aux athlètes d'élite qu'il encadre à titre de physiologiste. «Le gain de performance semble modeste, mais c'est tout à fait légal et il n'y a pas de contre-indication pour les gens en bonne santé, souligne-t-il. Pour ce qui est des risques de blessures engendrés par l'atténuation de la douleur à l'exercice, il faut savoir que l'effet analgésique produit par une séance de TENS est moindre que celui obtenu avec des anti-inflammatoires en vente libre.»