Certaines stratégies alimentaires favorisant la santé du microbiote intestinal pourraient, en théorie du moins, aider à prévenir la COVID-19 ou à atténuer ses complications. Toutefois, comme aucune étude clinique à grande échelle sur la question n'a encore été finalisée, il serait prématuré d'en faire une recommandation formelle. Voilà le message principal qui se dégage d'une analyse publiée dans Advances in Nutrition par Laurence Daoust, Geneviève Pilon et André Marette, de la Faculté de médecine, de l'Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels de l'Université Laval et du Centre de recherche de l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec.
«En début de pandémie, il y a eu beaucoup d'exagération au sujet de l'effet de certains composés naturels contre la COVID-19, rappelle André Marette. Chaque semaine apportait son produit miracle. C'est ce qui nous a donné l'idée de faire le point sur la question.»
Premier constat. Au cours des deux premières vagues de la pandémie, deux groupes étaient surreprésentés par les personnes les plus durement frappées par la COVID-19: les personnes âgées et les personnes atteintes de maladies métaboliques comme l'obésité, le diabète et les maladies cardiovasculaires. Ces deux groupes ont un dénominateur commun, souligne Laurence Daoust. Leur condition est caractérisée par une inflammation chronique de bas niveau.
«Chez les personnes âgées, cet état est associé à une diminution marquée de l'efficacité du système immunitaire. Quant aux personnes souffrant d'obésité, de diabète ou de maladies cardiovasculaires, elles ont souvent des problèmes pulmonaires. Les conditions préexistantes rendent ces deux groupes particulièrement vulnérables à la COVID-19.»
Second constat: la forme sévère de la COVID-19 est associée à un dérèglement inflammatoire qui s'exprime par une surproduction de molécules pro-inflammatoires conduisant, dans les cas extrêmes, à une tempête de cytokines.
Troisième constat: les patients hospitalisés en raison de la COVID-19 souffrent de complications intestinales et la composition de leur microbiote intestinal est altérée.
«Ces faits suggèrent l'existence de mécanismes intestinaux qui sont associés à la sévérité de la maladie, résume André Marette. Notre hypothèse est que les milliards de microorganismes de l'intestin produisent des métabolites qui sont transportés par le sang et par la lymphe vers d'autres parties du corps où ils modulent les réponses immunitaires et inflammatoires de l'organisme. Des stratégies nutritionnelles favorisant la santé de microbiote intestinal pourraient donc aider à prévenir la COVID-19 et ses complications.»
De nombreuses études menées en laboratoire ont démontré les effets anti-inflammatoires et immunitaires des polyphénols, des oméga-3, des probiotiques et de la vitamine D. Les conclusions des premières études cliniques sur le potentiel de ces composés pour contrer la COVID-19 devraient être annoncées d'ici quelques mois. Pour le moment, aucune stratégie nutritionnelle n'a été approuvée par les responsables de la santé publique.
Les épidémiologistes s'entendent pour dire que la COVID-19 est avec nous pour un bon moment, rappelle André Marette. Il est donc de la plus grande importance de trouver des façons complémentaires d'y faire face. Le chercheur met les gens en garde contre la tentation de se prescrire des suppléments de composés naturels et de forcer la dose en pensant que le pire qui peut arriver est que ça ne fonctionne pas. «Il peut y avoir des effets secondaires indésirables, notamment avec la vitamine D qui contribue à la calcification des vaisseaux sanguins. En attendant les résultats des études cliniques, il faut plutôt viser à trouver ces composés dans une alimentation saine et variée qui favorise la diversité du microbiome intestinal.»