Vêtu d'un sarrau blanc, le regard concentré, Jean Iung observe des myriades de données à l'écran de son ordinateur. Posée près de lui, une microbalance à quartz lui permet d'analyser les propriétés d'une fine couche de babeurre, un produit dérivé de la crème du lait. Son but est d'élaborer une approche pour retirer les résidus membranaires de ce liquide peu valorisé en transformation alimentaire.
«Le babeurre contient des minéraux et des protéines, notamment des résidus membranaires qui ont un grand intérêt pour la santé. Avec notre système, on pourra retirer les résidus membranaires, ce qui permettrait de transformer le reste en lait écrémé et de valoriser les résidus membranaires dans des aliments ou du lait pour bébés, certains constituants pouvant avoir des impacts positifs sur le développement du cerveau du nouveau-né», explique-t-il.
Jean Iung, venu de France pour faire son doctorat à l'Université Laval, est l'un des nombreux chercheurs qui travaillent au STELA, le Centre de recherche en sciences et technologie du lait. Ici, il règne une véritable ambiance de fourmilière. Le STELA, ce sont plus de 15 professeurs et une centaine d'étudiants aux cycles supérieurs, de professionnels de recherche et de stagiaires postdoctoraux, ce qui en fait la plus importante équipe de recherche laitière au Canada.
Leur mission: contribuer à l'acquisition de nouvelles connaissances sur le lait, les procédés de transformation et le rôle des produits laitiers sur la santé. Le centre, qui fait partie de l'Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels, vise aussi à former du personnel hautement qualifié pour fournir de la relève dans l'industrie laitière.
Démocratiser la science
Avec divers partenaires, le Centre STELA profitera du prochain Congrès de l'Acfas, soit le plus important rassemblement scientifique francophone, pour présenter les récentes avancées dans son domaine de recherche. Les 10 et 11 mai, le colloque Innovations en sciences laitières à l'ère du numérique réunira chercheurs, producteurs laitiers, transformateurs, agronomes, vétérinaires et décideurs. «L'idée est de partager ce qui a été produit ces dernières années sur le plan de la recherche universitaire, permettre aux étudiants de mettre en valeur leurs résultats et transférer ces découvertes aux acteurs du milieu, qui pourront les appliquer dans leur secteur», indique Steve Labrie, directeur du STELA et professeur à la Faculté des sciences de l'agriculture et de l'alimentation.
D'une conférence à l'autre, il sera question aussi bien de la production du lait que de la consommation, en passant par la transformation. L'utilisation de l'intelligence artificielle dans les fermes, le bien-être animal et les pratiques de transformation durables font partie des multiples sujets qui seront explorés.
La programmation du colloque ratisse large et ce n'est pas un hasard. «Souvent, les producteurs et les transformateurs font leurs activités chacun de leur côté. Pourtant, chaque étape est liée; ce qui se passe à la ferme a une répercussion en transformation. À travers le colloque, on veut mettre en relation plusieurs acteurs du secteur laitier et les amener à développer des connaissances qui leur permettront de s'ajuster dans leurs pratiques», dit Steve Labrie.
Ce colloque, qui se déroulera en ligne, sera précédé d'une activité familiale au Grand Marché de Québec, les 7 et 8 mai. Avec une vingtaine d'autres organisations liées à l'Université Laval, des étudiants-chercheurs du STELA seront sur place pour animer des ateliers interactifs sur la santé durable. Au menu, jeux pour les enfants, démonstration de caillage du lait et plusieurs autres activités de vulgarisation.
Pour le directeur du STELA, il est primordial de partager l'expertise universitaire avec le grand public. «Le lien entre le consommateur et la façon avec laquelle ses aliments sont fabriqués ou transformés est plutôt faible. Les gens entendent parler de certains défis ou problématiques de l'industrie, mais ils ont besoin de plus d'informations pour être mieux outillés dans leurs choix. Comme chercheur, on a l'occasion de pouvoir vulgariser la science et expliquer où sont rendues les connaissances.»
Les produits laitiers à l'heure des grands défis
Au Québec, le secteur laitier représente la principale industrie agroalimentaire. À lui seul, il génère 27% des recettes agricoles de la province. Il n'en demeure pas moins que les défis sont nombreux.
Pour le professeur Labrie, les étudiants du Centre STELA sont appelés à jouer un rôle clé pour l'avenir du secteur laitier.
On peut consulter les sites du Centre STELA et de l'Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels pour en savoir plus sur leurs activités de recherche.
L'ensemble de la programmation du Congrès de l'Acfas est disponible sur le site de l'événement.