Pierre Blanchet est titulaire depuis presque 10 ans, au Département des sciences du bois et de la forêt, de la Chaire industrielle de recherche du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) sur la construction écoresponsable en bois (CIRCERB). Il dirige également le Partenariat industriel de recherche pour une construction écoresponsable en bois, un regroupement multidisciplinaire de 22 partenaires couvrant toutes les compétences dans le domaine du bâtiment.
En ce mardi 25 octobre, le professeur Blanchet assistera à une cérémonie au Musée canadien de la nature à Ottawa au cours de laquelle il recevra une importante distinction honorifique annuelle du CRSNG, le prix Synergie pour l’innovation. Il sera accompagné d’un représentant du Partenariat. Le prix récompense les partenariats de recherche les plus efficaces et fructueux entre des établissements d’enseignement supérieur et des organismes publics ou privés.
«Je suis très content de recevoir ce prix, dit-il, je ressens un grand sentiment de satisfaction. Piloter un partenariat comme le mien est assez exigeant. Il y a toujours eu la volonté, au sein du Partenariat, d’avoir des représentants de la chaîne de création de valeur, de la conception des matériaux biosourcés jusqu’à l’exploitation des bâtiments. Nous avons des architectes, des firmes de génie-conseil, des gens à la certification environnementale, des fournisseurs de matériaux et de services. Le gouvernement, par la voie de la Société d’habitation du Québec, arrive à la fin pour porter la voix des utilisateurs de bâtiments. Tous sont associés à des initiatives de longue durée avec l’Université Laval.»
Réduire l’empreinte environnementale de la construction
Le mandat de la Chaire consiste à concevoir des solutions permettant de minimiser les émissions de carbone, donc l’empreinte environnementale de la construction commerciale, publique, industrielle et résidentielle multiétagée. Rappelons que le bois a la propriété de capter et de stocker du dioxyde de carbone, l’un des principaux gaz à effet de serre.
«À la Chaire, nous avons une vision holistique de la construction en bois, souligne Pierre Blanchet. Je ne connais pas d’autre groupe de recherche en milieu universitaire qui a ce regard beaucoup plus large. Habituellement, les chercheurs se penchent sur des aspects très précis de la construction en bois. On ne peut pas avoir notre vision large et tout faire seul. C’est impossible. J’ai mon réseau de professeurs, j’ai mon réseau de partenaires industriels, j’ai mon réseau de collaborateurs internationaux. Tous ces niveaux se superposent et s’imbriquent.»
Selon lui, le Québec et le Canada sont des leaders mondiaux en construction durable en bois.
«Le Partenariat, ajoute-t-il, est le reflet de la complexité d’un bâtiment. Un bâtiment n’est pas un objet simple. Il est constitué de systèmes qui, eux-mêmes, sont constitués de matériaux. Chaque bâtiment est unique. On ne peut pas dire: je vais réutiliser la solution que j’ai prise dans le bâtiment A et la mettre dans le bâtiment B. Le B n’est pas la copie conforme du A. Il se peut que cette solution ne performe pas au même niveau.»
Il insiste sur les liens cordiaux qui unissent la Chaire aux membres du Partenariat. «Nous faisons de la coconstruction de connaissances avec nos partenaires, indique le professeur. Avec le temps, nous avons vraiment réussi à établir cette relation de confiance. Nous sommes complices. Des partenaires m’appellent, me sensibilisent à une idée et me demandent si elle peut être explorée en milieu universitaire. Ils ne mettent pas de pression indue sur le projet de recherche, ils en acceptent les résultats, qu’ils soient positifs ou négatifs, par rapport à ce qui avait été suggéré au départ. Je vis le respect. Ils acceptent comment on travaille et les limites de ce que nous faisons.»
Le maître d’œuvre des innovations
Pierre Blanchet est considéré comme le maître d’œuvre des innovations dans le secteur de la construction en bois au Canada. À la CIRCERB, une quinzaine de professeurs de plusieurs départements répartis dans trois facultés, ainsi qu’une soixantaine d’étudiants aux cycles supérieurs et de stagiaires postdoctoraux collaborent aux travaux de recherche. Les facultés sont celles de Foresterie, de géographie et de géomatique, des Sciences et de génie, et d’Aménagement, d’architecture, d’art et de design.
Au nombre des projets de recherche en cours à la Chaire mentionnons la mise au point d’un procédé non toxique de protection du bois en conditions extérieures et le développement de matériaux d’enveloppe du bâtiment biosourcés, c’est-à-dire issus de la matière organique renouvelable, dont un pare-vapeur, un pare-intempérie et un isolant giclé. Cet isolant utilise, entre autres, des nanofilaments de cellulose.
«Dans le premier cas, explique le professeur, le traitement est en évaluation depuis quelques mois pour implantation chez un de mes partenaires. Nos plus récents objectifs visent à démontrer qu’il n’y a aucun lessivage du traitement dans les sols, donc sans conséquences pour l’environnement. Dans le second cas, il faut d’abord dire que l’enveloppe est le deuxième système en importance pour l’utilisation de matériaux dans un bâtiment. Sa contribution dans les impacts environnementaux du bâtiment est donc importante. Traditionnellement, ce système utilise beaucoup de matériaux pétrosourcés, c’est-à-dire issus de ressources fossiles. Trois candidats au doctorat sont actuellement actifs sur l’objectif de rendre les parois de nos bâtiments fortement biosourcées, avec des performances équivalentes à celles des matériaux pétrosourcés.»
Le professeur Blanchet a participé à la réflexion qui a mené à l’élaboration de la Charte du bois au Québec. Il agit aussi à titre de réviseur pour des initiatives provinciales et fédérales dans le domaine et il pilote une veille technologique pour la Régie du bâtiment du Québec.
Le jour de l’entrevue avec ULaval nouvelles, il terminait un voyage de trois semaines au Pays basque espagnol, plus précisément chez Tecnalia, un centre de recherche et de développement technologique de référence en Europe sur la construction regroupant 1500 employés. «Je suis en année d’études et de recherche, dit-il. J’ai été accueilli par le groupe de l’efficacité énergétique et du bâtiment durable. J’ai eu des échanges avec eux et j’ai créé des synergies.»