La perte de sensibilité du goût ou de l'odorat persiste pendant au moins 11 mois chez le tiers des personnes qui ont contracté la COVID-19. C'est ce que rapporte une équipe de chercheurs de l'UQTR, de l'INSPQ et de l'Université Laval dans une étude publiée par la revue Chemical Senses.
Les chercheurs arrivent à ce constat après avoir mené une enquête auprès de 366 travailleurs de la santé qui avaient reçu un diagnostic de COVID-19, confirmé par test PCR, entre mars et juin 2020. Les participants devaient répondre à un questionnaire en ligne portant sur leurs capacités olfactives et gustatives 11 mois après l'infection. Ils devaient aussi effectuer des tests sensoriels maison à l'aide d'aliments tels que du beurre d'arachides, du café, du vinaigre, du sel et du sucre.
Les données recueillies révèlent qu'au moment de l'infection, les problèmes olfactifs et gustatifs avaient touché respectivement 84% et 82% des répondants. «Onze mois plus tard, le tiers des répondants estimaient que leur capacité olfactive ou gustative était moins bonne ou beaucoup moins bonne qu'avant leur infection à la COVID-19», résume l'un des auteurs de l'étude, le neurologue Nicolas Dupré, professeur à la Faculté de médecine et chercheur au Centre de recherche du CHU de Québec-Université Laval.
Une autre étude reposant sur les autopsies pratiquées sur des personnes décédées des suites d'une COVID-19 a révélé que le virus pouvait se retrouver dans un sous-type de neurones de la muqueuse nasale. Ces neurones sont connectés au bulbe olfactif, la région du cerveau impliquée dans le traitement des signaux olfactifs. «Les personnes qui n'ont pas retrouvé leur sensibilité olfactive un an après l'infection ont peut-être eu des atteintes plus sévères de ces neurones, avance le professeur Dupré. Il se peut aussi que la réponse inflammatoire déclenchée par le virus ait causé plus de dommages.»
«La bonne nouvelle est que la majorité des personnes devrait éventuellement recouvrer la plus grande partie de leur sensibilité olfactive ou gustative antérieure, poursuit le neurologue. Il peut y avoir régénération de la zone atteinte dans la muqueuse nasale, ou d'autres neurones peuvent prendre le relais et compenser ce qui a été perdu.»
Et si les progrès tardent à venir? «Certains sites Web proposent des exercices pour rééduquer l'odorat. Il n'y a pas encore de données probantes qui démontrent l'efficacité de ces exercices, mais, intuitivement, entraîner le cerveau devrait procurer des bienfaits, sans faire de tort», estime le professeur Dupré.
Les auteurs de l'étude sont Nicholas Bussière, Ji Mei, Cindy Levesque-Boissonneault et Johannes Frasnelli, de l'UQTR, et Mathieu Blais, Sara Carazo, François Gros-Louis, Robert Jr Laforce, Gaston De Serres et Nicolas Dupré, du Centre de recherche du CHU de Québec-Université Laval.