
Il faut une bonne expertise des moutons pour guider un troupeau de plusieurs centaines de têtes dans de vastes aires coupées. Dans cette étude, la personne responsable de ce travail était un berger australien établi en Colombie-Britannique.
— Dennis Loxton
En 2005 et 2006, des centaines de moutons ont été conduits dans des sites forestiers récemment coupés de Fort St. James, dans le centre de la Colombie-Britannique, pour des séjours de quelques jours. Les moutons en profitaient pour se délecter des végétaux qui abondent sur les sites après une coupe forestière, notamment des épilobes, pissenlits, cornouillers, rhododendrons et fougères. Moins appétissants que les plantes herbacées, les jeunes conifères, plantés après les coupes forestières, sont boudés par les moutons.
Rut Serra et Damase Khasa, du Département des sciences du bois et de la forêt, et leur collègue Christopher Opio, de l'University of Northern British Columbia, ont eu l'idée de comparer la croissance des arbustes qui poussaient dans les sites broutés par les moutons à celle de sites témoins de la même région. Les données qu'ils ont recueillies en 2011 indiquent que la croissance en hauteur des plants de pins et d'épinettes dépasse celle des sites témoins à partir du deuxième passage du troupeau. Après 10 années de croissance, la différence est d'environ 20% entre les arbustes des deux sites. «Les jeunes conifères ont profité de la réduction de la compétition végétale entraînée par le broutage des moutons, avance Damase Khasa. Par ailleurs, il se peut que leur crottin ait enrichi le sol et favorisé la croissance des arbustes.»
En théorie, rien n'empêcherait le recours aux moutons dans les plantations forestières du Québec, poursuit le professeur. En pratique toutefois, il y a quelques embûches. «D'abord, il faut une bonne expertise des moutons pour guider un troupeau de plusieurs centaines de têtes dans de vastes aires coupées. Pour notre étude, la personne responsable de ce travail était un berger australien établi en Colombie-Britannique. Ensuite, il faut des moyens logistiques considérables pour déplacer tous ces moutons d'un site de coupe à l'autre. Mais, considérant les avantages environnementaux du mouton et l'acceptabilité sociale de cette approche, il s'agit d'un système pastoral qu'il vaudrait la peine de tester ici.»
Une expérience de broutage par les moutons avait été réalisée dans la forêt modèle du Bas-Saint-Laurent en 1993. Malgré des résultats encourageants, l'étude n'avait pas eu de suites.