
Les motos vendues au Canada respectent des normes sonores établies par Transports Canada, mais certains propriétaires s'amusent à modifier le système d'échappement de leur engin pour lui donner davantage de chien. Il n'était toutefois pas facile de prouver qu'ils enfreignaient la loi. «On peut facilement mesurer la vitesse d'une moto, mais la tâche est plus complexe lorsqu'il s'agit de quantifier le bruit qu'elle produit parce que plusieurs facteurs entrent en ligne de compte, notamment la distance ente la moto et l'observateur», explique le professeur Lévesque.
Le test utilisé par Transports Canada pour homologuer les motocyclettes est effectué sur un circuit fermé. Il consiste à pousser le bolide à pleins gaz et à mesurer le niveau sonore à 15 mètres de la voie. Inutile de préciser que, dans la vraie vie, les policiers qui interceptent une moto bruyante ne peuvent reproduire ce test sur place (même si certains motocyclistes se prêteraient volontiers à l'exercice!).
Il a donc fallu concevoir un test stationnaire pour établir la limite de bruit que produisent des motos homologuées lorsqu'elles tournent au point mort, à un régime donné. Ce test devait tenir compte des spécificités des différents modèles. «Le bruit produit par certaines marques de motos est élevé même lorsque le moteur tourne au ralenti et augmente progressivement lorsqu'on le pousse. D'autres modèles sont silencieux à petite vitesse, mais le bruit qu'ils produisent grimpe rapidement lorsque le régime augmente.» Autres éléments à considérer: les véhicules qui respectaient la norme dynamique fédérale devaient passer le test statique québécois, le niveau sonore d'un modèle varie légèrement d'une moto à l'autre, et l'usure de l'engin affecte le bruit qu'il produit.
C'est ainsi que le chercheur est arrivé à une norme de 100 décibels. «Le fait que ce soit un chiffre rond est un pur hasard», assure-t-il. À titre comparatif, ce seuil équivaut au bruit produit par un marteau pneumatique à une distance de 1 mètre.
Un protocole rigoureux de mesure du niveau sonore doit être appliqué pour tester une moto suspecte. Les policiers doivent installer un microphone relié à un sonomètre à une distance de 50 cm et à un angle de 45 degrés par rapport à la sortie du tuyau d'échappement. «En procédant de cette façon, les bruits ambiants ont très peu d'influence sur la lecture du sonomètre», précise-t-il. Le test exige à peine une minute de travail.
Cette méthode sera mise à l'essai au cours des trois prochaines années par les corps policiers de 15 villes et municipalités québécoises. Les motocyclistes pris en défaut recevront une contravention allant de 100$ à 200$. S'ils refusent de collaborer, l'amende grimpera de 200$ à 300$. Il ne faut pas s'attendre à ce que nos routes deviennent des havres de paix pour autant, prévient le chercheur. «La norme canadienne permet la circulation de motos bruyantes sur nos routes, et la limite de 100 décibels à laquelle nous sommes arrivés devait en tenir compte. Ce ne sont que les motocyclettes excessivement bruyantes qui échoueront le test stationnaire.»