Étienne Cardinal, Jean-Pierre Tremblay et Steeve Côté, de la Chaire CRSNG-Produits forestiers Anticosti, et leur collègue Jean-Louis Martin, du CNRS de France, ont profité du système d'enclos expérimentaux érigés sur l'île d'Anticosti pour tester l'effet de la densité de cerfs sur la composition de la faune ailée. Ces enclos, dont la superficie varie de 3 à 30 km2, permettent d'avoir une emprise sur la densité de cerfs et sur l'intensité de broutement qu'ils exercent sur la végétation. Grâce à la collaboration de chasseurs, des zones expérimentales ayant des densités de 0, 7,5, 15 et plus de 27 cerfs/km2 ont été créées dans des milieux où l'on avait récemment pratiqué des coupes forestières, en prenant soin de laisser environ le tiers des arbres sur pied.
Six ans plus tard, les zones qui abritaient des densités de cerfs inférieures à 7,5 têtes/km2 montraient un début de rétablissement des forêts de sapins baumiers et une régénération accrue du bouleau à papier, rapportent les chercheurs dans un récent numéro du Canadian Journal of Zoology. Ce retour de la végétation tranche avec ce qui est observé à l'état naturel sur l'île d'Anticosti. Les populations de cerfs, qui affichent une densité moyenne de 20 têtes/km2, rasent les jeunes pousses de sapin et de bouleau.
La reprise végétale observée dans les zones à faible densité de cerfs semble faire le bonheur des oiseaux qui y viennent plus nombreux en nombre et en espèces. La présence du bouleau semble déterminante dans ce choix. Selon les estimations des chercheurs, augmenter la couverture en bouleau de 10% à 20% permettrait d'accroître l'abondance et la diversité des oiseaux de 17% et de 31% respectivement.
«Abaisser la densité de cerfs pendant six ans suffit à produire des effets mesurables sur la régénération végétale après coupe et des effets indirects sur l'abondance et la diversité des oiseaux, même dans un milieu qui a subi un surbroutage pendant plus de 80 ans», concluent les auteurs de l'étude.