
Une voiture expérimentale, munie de caméras surveillant le conducteur et les alentours du véhicule, a permis d'évaluer l'impact d'une activité secondaire sur le comportement au volant.
— Photo Nathan Fried-Lipski, MIT AgeLab
Pour faire cette démonstration, les chercheurs ont invité des personnes de trois groupes d'âge — 36 dans la vingtaine, 35 dans la quarantaine et 35 dans la soixantaine — à prendre le volant d'un véhicule expérimental et à faire une balade de 40 minutes sur l'autoroute 93 près de Boston. Cette voiture était munie de caméras braquées vers l'avant, l'arrière et les deux côtés du véhicule, permettant ainsi de quantifier le nombre de changements de voie et le temps passé dans la voie la plus à gauche de cette autoroute. Les données montrent qu'en condition de conduite sans interférence, les automobilistes dans la soixantaine roulent de 2 à 4 km/h moins vite que les plus jeunes, qu'ils sont deux fois moins portés à effectuer un changement de voie et qu'ils passent 2,5 fois moins de temps dans la voie la plus à gauche. «Comme on le prévoyait, les conducteurs âgés adoptent un style de conduite plus prudent», souligne l'étudiant-chercheur Martin Lavallière.
Pour évaluer l'effet d'une distraction sur le comportement des conducteurs, les chercheurs ont eu recours à un test de rappel. Un enregistrement audio présentait une énumération de chiffres et, selon les consignes qui leur étaient données au préalable, les participants devaient nommer celui qu'ils venaient tout juste d'entendre (tâche facile), celui qui le précédait ou celui qui venait deux rangs plus tôt (tâche complexe). Les données montrent que cette tâche mentale réduit la probabilité de changer de voie, peu importe l'âge du conducteur. Cette probabilité est 1,6 fois plus faible lorsque la tâche est simple et 2 fois plus faible lorsque la tâche est complexe. De plus, les sujets des trois groupes réduisent spontanément leur vitesse de 2 à 4 km/h pendant ces tests. «Nos résultats démontrent que, dès que l'attention du conducteur est accaparée par autre chose que la conduite automobile, son comportement en est affecté, commente Martin Lavallière. Ceci peut avoir une incidence sur la fluidité de la circulation, mais aussi sur le risque de collision.» À la lumière de ces résultats, l'étudiant-chercheur estime que les automobilistes qui se croient suffisamment habiles et compétents pour conduire et faire autre chose en même temps se leurrent. «Lorsqu'une partie de notre attention est consacrée à autre chose qu'à conduire, il y a un rétrécissement du champ de perception, peu importe l'âge du conducteur et la source de la distraction.»
Cette étude serait la première à établir un lien entre les changements de voie sur une autoroute, l'âge du conducteur et la charge attentionnelle consacrée à la conduite. Martin Lavallière a d'ailleurs reçu le prix Dr. Charles H. Miller décerné par l'Association canadienne des professionnels de la sécurité routière à l'auteur de la meilleure communication technique présentée lors de la Conférence multidisciplinaire canadienne sur la sécurité routière.