«En analysant les paroles des chansons comme Louise, Linda ou Pourquoi donc as-tu brisé mon cœur qui ont lancé la carrière de Michel Louvain à la fin des années 1950, dit Chantal Savoie, on remarque que le rôle traditionnel entre les hommes et les femmes y est inversé, l’homme étant en position de dominé par rapport à la femme. Pour que son amoureuse ne le quitte pas, il s’agenouille à ses pieds, pleure, la supplie de rester. Cette attitude avait tout pour plaire aux jeunes filles. Michel Louvain s’inscrit également dans l’affiliation des crooners, très populaires aux États-Unis à cette époque, où des chanteurs ne possédant pas trop de voix se sont mis à murmurer des mots d’amour à l’oreille des femmes par le truchement du micro.»
Le fils adoré
Son image lisse et son parcours sans faute d’où sont exclus scandales et coups de théâtre donnent du lustre au personnage. Il n’est pas non plus menaçant, encore moins négatif, lui qui s’obstine à chanter l’amour depuis un demi-siècle. C’est l’image du bon gars, du fils adoré, celui que toutes les mères du Québec (du moins ses admiratrices aux cheveux blancs) rêvent d’avoir à leur table le dimanche midi. «On a déjà traité Michel Louvain d’artiste quétaine et on le fait encore aujourd’hui, mais il n’en demeure pas moins qu’il se dégage de lui une espèce de fragilité et de vulnérabilité qui empêche la confrontation sur la place publique», souligne Chantal Savoie, qui établit un parallèle avec René Simard, autre artiste dont la conduite irréprochable cloue le bec de ceux qui auraient par hasard l’intention de parler en mal de lui.
«Les chanteurs de charme continueront à plaire tant que les femmes auront besoin de rêver à des hommes doux et bons qui compensent un peu l’image traditionnelle du mâle dominateur plein d’assurance, souligne Chantal Savoie. Les femmes ont besoin de savoir que des modèles masculins comme Michel Louvain existent encore.»