
Michel Maziade, directeur du CRULRG et professeur à la Faculté de médecine: «Nos résultats nous mettent sur la piste des mécanismes causaux et nous rapprochent ainsi d'un traitement plus efficace».
La schizophrénie et la maladie bipolaire sont des problèmes de santé qui s’amorcent tôt dans la vie, mais qui ne se sont diagnostiqués que vers l’âge de 20 à 25 ans, explique le professeur Maziade. Les sujets de l’étude, dont l’âge variait entre 7 à 22 ans, n’avaient pas encore reçu de diagnostic de ces maladies. Par contre, ils provenaient de familles où l’incidence de ces troubles est de 15 à 20 fois plus élevée que dans le reste de la population et l’un de leurs parents en était atteint. Des tests neuropsychologiques ont révélé que ces jeunes non affectés par la maladie, mais à haut risque, obtiennent des résultats nettement moins bons qu’un groupe témoin à des tests de mémoire et de tâches exécutives (planification, classification et interprétation d’informations). «Ces tests mettent en lumière, dès l’enfance ou l’adolescence, des dysfonctions mesurables du cerveau qui pourraient servir de marqueurs précoces de la maladie», explique le professeur Maziade.
La schizophrénie et la maladie bipolaire prennent de nombreuses formes et il n’existe pas encore de tests biologiques permettant de confirmer rapidement et hors de tout doute un diagnostic. L’étude génétique des familles de l’Est du Québec affectées par ces maladies, que poursuit le CRULRG depuis 1989, a permis la découverte, dans le bagage héréditaire des 46 familles participantes, de dix sites de susceptibilité qui sont partagés par les deux maladies. Les dysfonctions révélées par les tests neuropsychologiques se sont aussi avérées très similaires peu importe si les jeunes provenaient de familles à risque de schizophrénie ou de maladie bipolaire. «Les deux maladies ont beaucoup similarités. On peut penser qu’elles ont une cause commune et que quelque chose d’autre vient éventuellement leur apporter leur spécificité» avance le professeur Maziade.
Aux yeux de ce psychiatre qui connaît trop bien les bouleversements que provoquent ces maladies dans la vie des personnes qui en sont atteintes et dans celle de leurs proches, les résultats qu’il livrera lors du congrès de Colorado Springs sont porteurs d’espoir. «Les médicaments disponibles présentement traitent les symptômes, mais pas les causes de la maladie. Nos résultats constituent une nouvelle encourageante parce qu’ils nous mettent sur la piste des mécanismes causaux et nous rapprochent ainsi d’un traitement plus efficace. Ils ouvrent aussi des brèches du côté de la prévention parce que l’identification précoce des enfants à risque nous permettra de mieux les encadrer, en particulier dans leur apprentissage scolaire qui s’avère souvent difficile.»
L’équipe du CRULRG qui a réalisé cette étude était formée de Michel Maziade, Nancie Rouleau, Nathalie Gingras, Chantal Mérette, Marc-André Roy, Elsa Gilbert, Marie-Claire Doré, Karine Létourneau et Andrée-Anne Lefèbvre.