Tel est l’un des conseils qu’a prodigués Brian Mishara, directeur du Centre de recherche et d’intervention sur le suicide et l’euthanasie et professeur au Département de psychologie à l’UQAM, lors d’une conférence ayant pour thème «L’option suicide au Québec», prononcée le 6 février au pavillon Alphonse-Desjardins. «On ne naît pas avec la conception qu’il est possible de se tuer, a expliqué Brian Mishara. L’apprentissage de notre conception du suicide ainsi que les attitudes associées au suicide font partie du développement humain. Cela dit, le suicide existe depuis toujours et dans tous les pays du monde. On a même trouvé des hiéroglyphes datant de 4 000 ans où un homme expliquait en détail pourquoi il avait décidé de se suicider. Ce sont les mêmes symptômes dont on peut lire la description dans les manuels de psychiatrie d’aujourd’hui.»
Le héros américain
Partout, la même raison préside à l’acte fatal: on souhaite à tout prix que cesse une souffrance perçue comme insoutenable. S’il est faux de prétendre que le Québec possède le plus haut taux de suicide au monde, il est vrai de dire qu’il est relativement élevé parmi les pays développés et qu’il touche davantage les hommes que les femmes. Encore là, le cinéma exerce une forte influence sur les comportements. «L’homme québécois apprend dès son plus jeune âge à s’identifier au héros américain, celui qui rejette toute forme d’aide et décide de se débrouiller tout seul pour régler ses comptes. On le sait: les hommes consultent en moins grand nombre que les femmes et, lorsqu’ils le font, ils sont déjà en très grande détresse psychologique.»
Pour Brian Mishara, les composantes de l’option suicide tiennent en peu de mots. «C’est l’idée que je peux me tuer, qu’il n’existe pas d’autres solutions et que le suicide est une bonne façon de résoudre mes problèmes, a expliqué le conférencier. Il faut savoir que les troubles mentaux ont une influence sur notre capacité de raisonner et que la personne souffrant de dépression voit toute sa vie à travers les lunettes de la déprime. C’est à ce moment que les facteurs de protection entrent en jeu, comme le fait d’avoir une personne à qui se confier ou de pouvoir compter sur un réseau d’entraide. Il faut aussi créer un environnement où le contrôle de l’accès aux moyens pour mettre fin à ses jours est limité. Par exemple, de noter Brian Mishara, une maison dont les armoires sont bourrées de médicaments peut faire la différence entre la vie ou la mort pour un adolescent suicidaire. Même chose pour les armes à feu. Le contrôle de l’accès aux moyens ne résout pas le problème, mais cette mesure permet au moins de gagner du temps.»