
Voici les étudiants de la première cohorte de cette maîtrise intensive d'un an. Ils seront diplômés en août.
L’un est à la tête d’une PME d’une trentaine d’employés; l’autre travaille pour le plus grand groupe financier coopératif au pays, qui rassemble près de 50 000 employés.
Harold Dumur, fondateur et PDG d'OVA, une entreprise spécialisée dans le domaine de la réalité virtuelle et augmentée, et Jean-Pierre Malo, designer de futur chez Desjardins Lab, n’ont aucunement à être convaincus de la pertinence de la maîtrise sur mesure en intelligence urbaine. Maîtrise pour laquelle ils sont tous deux partenaires d’affaires depuis un an, soit depuis la mise en place de la toute première cohorte.
Diplômé en génie industriel de l'Université Laval, l’entrepreneur Harold Dumur est en lien depuis plusieurs années avec le professeur Sébastien Tremblay de l’École de psychologie, aussi directeur de l’Unité mixte de recherche en sciences urbaines (UMR-SU) et grand responsable de cette maîtrise.
«Chez OVA, nous avons lancé, il y a quelques années, le logiciel StellarX, une plateforme de création de contenu de réalité virtuelle et augmentée. Or, nous étions rendus à un stade où il fallait pousser notre réflexion à un plus haut niveau. Car, vous savez, quand on crée un logiciel, en fait notre premier à vie, c’est toujours un peu du “style libre”, c’est jamais très réfléchi ni structuré (rires). En libérant trois de mes employés pendant un an pour aller faire cette maîtrise intensive – et dont le projet d’études allait porter spécifiquement sur notre logiciel – on se donnait non seulement les moyens de mieux structurer l’ensemble de notre entreprise, d’améliorer l’approche de nos utilisateurs face au logiciel, mais aussi, et conséquemment, d’augmenter nos ventes.»
Lors de l'accueil de la première cohorte, il y a un an, OVA ne comptait que 17 employés. Libérer trois d’entre eux pouvait donc sembler, à première vue, un enjeu de taille. Mais voilà: la grande flexibilité offerte par ce programme, ajoutée aux possibilités de bourses pour les étudiants, ont vite rassuré Harold Dumur.
«L’entreprise d’aujourd’hui n’est plus verticale ni hiérarchique, mais de plus en plus horizontale et de style très multidisciplinaire. À titre d’exemple, l’entreprise américaine Valve, qui est reconnue pour être avant-gardiste en ce sens. Pour le PDG de Valve, chaque bureau de l’entreprise doit être sur des roues, car chaque employé doit sentir qu’il n'a pas de place fixe et qu'il peut, à tout moment, prendre l’ascenseur et aller travailler avec d’autres collègues dans un tout autre département. Or, l’approche de la maîtrise est vraiment là. Elle amène ce changement de culture alors que les étudiants proviennent de domaines totalement différents et qu'ils réfléchissent, ensemble, à des pistes de solution. Et en ce sens, l’Université Laval devient vraiment une courroie d’accélération pour inciter cette approche dans le milieu des affaires.»

La maitrise est fondée sur une approche pédagogique expérientielle et interdisciplinaire regroupant des étudiants de différents profils et provenant de disciplines diverses.
Jean-Pierre Malo, designer UX/UI chez Desjardins Lab, va dans le même sens. Même s'il voit passer un grand nombre de propositions et de solutions innovantes chaque année, pour lui, il n'y a pas de doute: l’apport des universités en recherche et développement est devenu un incontournable dans le monde des affaires.
«Chez Desjardins, des experts, on en a des tonnes: des datas analysts, des spécialistes en secteurs d’affaires x-y-z, etc. Mais nous, ce qui nous intéresse dans cette maîtrise, c’est le fait d'avoir une toute nouvelle approche et une toute nouvelle lecture de nos problématiques, et que cela soit fait par des étudiants qui proviennent de diverses disciplines. Ce qui amène beaucoup de fraîcheur et même parfois, des pistes jamais envisagées de notre côté!»
À titre d’exemple, les quatre étudiants dont les projets de recherche sont rattachés au Mouvement Desjardins ont des formations en psychologie, en design industriel, en administration, en informatique, en dessin animé et même en études russes!
Sans oublier l’une des forces très appréciées de cette maîtrise: les rencontres régulières du comité consultatif, au cours desquelles étudiants, professeurs, partenaires industriels, utilisateurs et même futurs acheteurs potentiels échangent sur l’évolution des travaux de recherche en cours.
Un des projets de recherche appuyés par Desjardins, nommé Empreinte ta ville, porte sur la cartographie de l’empreinte carbone d’une ville. Une cartographie qui pourrait, par exemple, inciter des décideurs d’une caisse populaire à investir dans une entreprise qui présenterait un potentiel de baisse des émissions de gaz à effet de serre. L’autre projet de recherche, sur l’autonomie financière, vise à créer de nouveaux mécanismes pour aider le consommateur à mieux utiliser sa carte de crédit, et ce, notamment par un accompagnement en intelligence artificielle.
De l'entreprise familiale aux bancs de l'Université
«Nous sommes une quinzaine d’étudiants à la maîtrise et tout le monde se connaît étroitement. On a tous des parcours différents et on échange énormément. Bref, ça nous manque beaucoup présentement!»
L’étudiante Anne-Sophie Riopel-Bouvier fait partie de la première cohorte de la maîtrise. Son projet de recherche, intitulé Brigade canine Cyber K9, est directement lié à son entreprise familiale, EXO Tactik, qui est spécialisée dans le pilotage de drones. Réalisé avec sa partenaire Cassandra Patry-Lebeau, le projet vise à confirmer la pertinence de l’interopérabilité entre l’unité canine des services de police et les équipages de pilotage de drones, puis d’en optimiser l’efficacité.
«La dynamique des cours est très motivante et enrichissante, indique l’étudiante qui est aussi pilote d’avion et instructrice de vol pour les Forces armées canadiennes. On est rapidement amenés à comprendre la vraie réalité du marché qui nous attendra après l’école. Chez EXO Tactik, mes collègues de travail m’ont même signifié que j’ai déjà énormément changé dans ma façon de communiquer, de structurer mes idées, dans mon attitude face aux nouveaux projets ou encore dans ma capacité à amener de nouveaux défis ou opportunités à l’entreprise. Pour moi, cette maîtrise s’est déjà avérée un gros changement dans ma vie professionnelle!»
Intelligence et transformation
La première cohorte terminera cette maîtrise intensive en août prochain. Nouveauté: à compter de l’automne, ce programme portera un nouveau nom: maîtrise en Intelligence et transformation.
«En discutant au cours de la dernière année avec nos étudiants, professeurs et partenaires, on a réalisé que plusieurs montraient de l'intérêt pour la maîtrise, mais pas uniquement dans le domaine de l’intelligence urbaine et des villes intelligentes, précise le directeur du programme, Sébastien Tremblay. Certains nous ont approchés pour des sujets portant sur le sport et la médecine, par exemple. On a donc réalisé que ce n’était pas tant la thématique, mais notre démarche, notre recette, qui connaissait un succès: l’utilisation du design thinking, le type d’accompagnement qu’on a par tutorat, l’accent sur le développement des compétences, la réalisation d’un projet, etc., soit un ensemble de moyens et d’innovations pédagogiques qui se distinguent d’un programme traditionnel.»
Et pourquoi ce nom? «On souhaitait un nom plus englobant, qui reflète mieux l'ensemble des enjeux actuels. Intelligence, pour intelligence humaine, intelligence artificielle, intelligence d’affaires, mais aussi dans le sens de société qui s’adapte; transformation, pour transformation numérique et ses impacts, comment bien y parvenir, mais aussi pour transformation sociétale et organisationnelle.»

Le design thinking est une approche de l’innovation centrée sur l’humain.
Le programme pourrait-il être pénalisé par le contexte de la COVID-19? «Bien au contraire, car la maîtrise devient comme jamais un véhicule de relance, affirme Sébastien Tremblay. L’employeur libère et conserve à la fois son employé, qui travaille pendant un an sur un projet structuré, encadré et accompagné et qui porte sur l’entreprise. Il fait donc évoluer l’entreprise, et tout ça, à de moindres coûts que cela lui coûterait normalement, et ce, notamment en raison des bourses et de l’implication financière de l’organisme national de recherche Mitacs. Ce qui devient donc un modèle économique vraiment intéressant. Finalement, le contexte covidien vient en quelque sorte relancer et accélérer le développement d’affaires, et la maîtrise vient encadrer cette accélération-là.»
D'ailleurs, pour la prochaine cohorte, des propositions de projets de recherche liés à la COVID-19 ont été retenues. Notamment dans le domaine de la culture, mais aussi par rapport à l’impact sociétal et individuel de la pandémie. Le professeur Tremblay se dit d'ailleurs tout à fait ouvert à écouter, avec son équipe, d’autres propositions.
«Il faut exploiter davantage et très rapidement toute l’intelligence d’affaires qui émerge des universités vers l’industrie, souligne le designer de futur Jean-Pierre Malo. Car il y a des choses hyper intéressantes qui se font, surtout dans un cadre de maîtrise sur mesure. Oui, on travaille avec des start-up et avec des entreprises hyper novatrices, mais le milieu universitaire, en collaboration avec le Mitacs et les entreprises, a énormément à donner à l’industrie. Il faut savoir davantage profiter de ces extraordinaires possibilités de travailler avec des universitaires qui marqueront le monde de demain.»
Plus d'information:
Le programme de maîtrise en intelligence et transformation
(et sa liste des projets de recherche en recrutement)
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*Merci à Thierry Mellon pour sa précieuse collaboration à la recherche d'images.