Les étudiants à la maîtrise professionnelle en architecture inscrits à l’atelier Ambiances physiques continuent à surperformer au concours annuel de l’American Institute of Architects Committee on the Environment (AIA COTE). Après avoir remporté un prix en 2019, les projets des étudiants de l’École d’architecture de l’Université Laval en ont gagné deux en 2020. Et voilà qu’ils ajoutent deux autres prix à leur palmarès. L’annonce a été faite le 22 avril, Jour de la Terre, à Washington.
Pour rappel, cette compétition est organisée en partenariat avec l’Association of Collegiate Schools of Architecture. Elle récompense 10 projets d’atelier de design qui exploitent des concepts de carboneutralité grâce à l’intégration créative et innovante de stratégies de design telles que l’éclairage naturel, le chauffage et le refroidissement passifs, les matériaux écologiques, la gestion de l’eau et la gestion durable de l’énergie. Le concours est ouvert aux étudiants des États-Unis, du Canada et du Mexique. Cette année, quelque 800 participants représentant près de 70 établissements universitaires, dont plusieurs écoles d’architecture renommées, ont soumis des projets.
«Nous sommes très fiers de nos étudiants et de l’équipe qui a contribué à ce succès», souligne Claude Demers, professeure à l’École d’architecture et coresponsable, avec son collègue André Potvin, de l’atelier Ambiances physiques.
«Les projets ont été réalisés à la session d’hiver 2020 dans le cadre d’un partenariat avec la communauté d’Ikaluktutiak, ou Cambridge Bay, au Nunavut, explique-t-elle. Ce partenariat vise la conception et la construction d’un centre sportif et de loisirs écoresponsable. Il prend la forme d’une recherche-action communautaire s’appuyant sur la riche culture architecturale et l’ingéniosité constructive de la communauté inuite de Cambridge Bay.»
Dans leurs démarches, les étudiants ont exploré des concepts bioclimatiques en tenant compte du savoir ancestral. «Les Inuits, poursuit-elle, sont très fiers de leur passé tout en étant ouverts à la technologie moderne. Ils souhaitent se reconnaître dans le futur bâtiment qu’ils veulent frugal du point de vue énergétique et robuste dans sa conception pour résister au climat extrême. Les deux projets primés au concours de l’AIA COTE visent l’optimisation du bien-être des utilisateurs et une conception de bâtiments à faible émission de carbone et à faible consommation d’énergie.»
Les professeurs Demers et Potvin et leurs étudiants ont séjourné du 2 au 6 mars 2020 à Ikaluktutiak. Huit des étudiants qui les accompagnaient provenaient de l’atelier Ambiances physiques. Trois autres, des doctorants, étaient rattachés à Sentinelle Nord, un vaste réseau de chercheurs de l’Université Laval. La délégation a engagé des discussions sur les besoins des partenaires inuits en matière de nouvelles constructions. En plus de présenter les travaux préliminaires des étudiants de l’atelier, les visiteurs ont rencontré des groupes de tous âges, en plus de prendre part à des activités participatives et à des tables rondes de planification. Ils ont aussi effectué des relevés environnementaux de bâtiments locaux pour s’inspirer de la culture architecturale de l’endroit.
Un encadrement interdisciplinaire
En atelier, les étudiants ont effectué des simulations lumineuses à l’aide de nombreuses maquettes découpées numériquement et d’outils numériques de validation environnementale comme des logiciels et des feuilles de calcul.
En plus des professeurs Demers et Potvin, l’encadrement pédagogique interdisciplinaire était assuré par des professeurs de génie civil et de génie mécanique, par un doctorant en acoustique et par deux professeurs en phytologie. Un expert en bâtiments nordiques s’est également joint à l’équipe.
La formation préprofessionnelle offerte par l’atelier est basée sur une démarche intégrée. «Il existe peu d’endroits où l’on enseigne dans un même atelier les aspects sensibles de l’expérience spatiale liés aux considérations énergétiques, soutient Claude Demers. Le professeur Potvin et moi-même avons élaboré une méthode de design qui intègre à la fois des outils d’analyse environnementale des bâtiments et les notions de bien-être des usagers relativement aux ambiances physiques telles que la lumière, la thermique et l’acoustique.»
Des bâtiments frugaux et robustes
Les étudiants Caroline Roux, Guillaume Couture, Rosemonde Gadoury-Salvail et Francis Lavoie ont réalisé le projet Nuuttuq. Selon la professeure Demers, le bâtiment exprime la notion de migration, de mouvement. «Dès l’origine du projet, explique-t-elle, la forme imaginée par les étudiants se voulait adaptée au climat, au point de vue de sa réponse au vent et à la lumière. En ce qui concerne l'aspect bioclimatique, l’énergie solaire est la plus abondante du printemps à l’automne. Le projet en tient compte avec un système de captage et un imposant vitrage qui laisse entrer le soleil pour chauffer et éclairer un espace tempéré, occupé à certains moments de l’année. Le niveau de confort atteint dans cet espace bioclimatique permet notamment d’y faire pousser des légumes et plantes comestibles durant l’été.»
Le projet Tupikhaq porte les signatures de Paola Araya-Valdes, Juliette Paget et Victoria Deslandes-Lyon. Le bâtiment comprend trois grands secteurs consacrés respectivement à la pratique du sport, notamment de la natation, aux rencontres socioculturelles, notamment entre jeunes et aînés, et à une cuisine collective dotée de serres. Selon la professeure, la structure est à la fois élégante, simple et claire. «La structure du bâtiment est basée sur un pliage, dit-elle. Elle est inspirée des structures triangulées des tentes inuites utilisées l’été. Les couleurs des espaces intérieurs sont celles de la lumière du ciel arctique, du lever et du coucher du soleil. Les ouvertures vers l’extérieur sont petites, ce qui minimise les pertes de chaleur, et le plafond blanc permet de distribuer efficacement la lumière du ciel. Cette architecture bioclimatique en climat extrême vise l’efficacité énergétique. Pour cela, les étudiantes ont tenu compte d’aspects tels que l’orientation des façades en fonction du soleil et la protection du vent.»
Une autre visite à Ikaluktutiak est prévue. «Nous voulons poursuivre les discussions avec la communauté et l’engager dans le processus de design, indique la professeure. Nous voulons que ce soit un beau projet.»