
C'est parce que la réduction des polluants à la source n'a pas eu suffisamment d'effets qu'il faut envisager une solution technologique pour restaurer le lac Saint-Augustin.
Situé à proximité de l'autoroute 40 et entouré de terres agricoles et de quartiers résidentiels, le lac St-Augustin est alimenté par des eaux chargées de sels de déglaçage, d'engrais et de polluants qui contribuent à son vieillissement prématuré. Les eaux et les sédiments du lac affichent de fortes concentrations de phosphore, favorisant les explosions d’algues bleu-vert pendant l’été, ainsi que de métaux lourds, ce qui affecte la qualité globale de ce plan d'eau et limite les activités aquatiques qui peuvent y être pratiquées. Malgré les mesures adoptées pour limiter l’arrivée des polluants dans ce lac, son état empire d’année en année. «Même si on parvenait à couper toutes les sources de pollution, on estime qu’il faudrait des centaines d’années avant que le lac St-Augustin retrouve son état naturel», avance Rosa Galvez. Le problème vient du fait que la circulation des eaux souterraines favorise le relargage des polluants contenus dans les sédiments du lac. «L’eau arrive par le fond et circule vers la surface, précise la chercheuse. La situation est pire en été parce que les bateaux à moteur contribuent au brassage des sédiments et à la mise en suspension du phosphore qu’ils contiennent.»
Au cours des cinq dernières années, grâce à l’appui financier du CRSNG et du FQRNT, Rosa Galvez et ses collègues Serge Leroueil, Jacques Locat et René Therrien ont étudié plusieurs méthodes pour restaurer ce lac. La solution qu’ils ont retenue comporte deux phases. D’abord, ils provoqueront la précipitation du phosphore contenu dans la colonne d’eau à l’aide de produits couramment utilisés dans le traitement de l’eau potable. «Il faut parvenir à abaisser de deux à trois fois la concentration de phosphore dans l’eau si on veut empêcher les blooms d’algues», précise la chercheuse. Une fois ce phosphore déposé sur la couche de sédiments, les chercheurs proposent de recouvrir le tout de roches calcaires qui réagissent naturellement avec le phosphore et l’empêchent ainsi de retourner dans la colonne d’eau. Contrairement à une membrane textile, cette approche a l’avantage de retenir le phosphore sans entraver la circulation naturelle des eaux du lac. Comme il s’agit d’un projet pilote servant à tester l’efficacité de cette approche, seuls les secteurs les plus contaminés seront recouverts de roches. Les effets sur la qualité de l’eau et sur la biologie du lac devraient être mesurables peu de temps après l’opération, prévoient les chercheurs.
Même si cette intervention s’avérait efficace, elle ne sera pas généralisée à tous les lacs touchés par la prolifération d’algues bleu-vert au Québec. «C’est parce que les mesures de réduction à la source n’ont pas eu suffisamment d’effets qu’on en est rendu à envisager pareil scénario pour le lac St-Augustin, souligne la professeure Galvez. C’est une solution qui ne devrait être considérée qu’en dernier recours.»