Cette étonnante observation provient d'une étude, réalisée par Jean-Philippe Chaput, Vicky Drapeau, Paul Poirier, Normand Teasdale et Angelo Tremblay, dont les résultats sont publiés dans le numéro de septembre de la revue Psychosomatic Medicine. Les chercheurs ont mesuré la prise alimentaire spontanée de 14 étudiantes après chacune des trois tâches suivantes: relaxer en position assise, lire et résumer un texte scientifique (tâche ardue s'il en est une), et compléter une série de tests de mémoire, d’attention et de vigilance à l'ordinateur. Après 45 minutes de chaque activité, les participantes étaient invitées à passer au buffet et à manger à satiété.
Les chercheurs avaient déjà établi que chaque séance de travail intellectuel ne requiert que trois calories de plus que la séance de relaxation. Malgré le faible coût énergétique de la pensée et malgré le fait que les participantes ne se sentaient pas plus affamées après un travail mental qu'après un repos, elles ont spontanément consommé 203 kilocalories de plus après avoir résumé un texte et 253 kilocalories de plus après les tests informatisés.
Des prélèvements sanguins effectués avant, pendant et à la fin de chaque séance ont révélé que le travail intellectuel induit des variations nettement plus importantes que le repos dans la concentration de glucose et d’insuline. «Ces fluctuations pourraient résulter du stress engendré par le travail ou encore être le reflet d’une adaptation biologique lors de la combustion du glucose», avance Jean-Philippe Chaput. L'organisme pourrait réagir à ces variations en stimulant la prise alimentaire afin de restaurer l’équilibre du glucose. Contrairement aux muscles qui utilisent plusieurs types de combustibles, le cerveau ne carbure qu'au glucose.
«La surcompensation calorique qui suit un travail intellectuel, combinée au fait qu'on se dépense peu physiquement lorsqu'on accomplit des tâches de réflexion, pourrait contribuer à l'épidémie d'obésité, résume Jean-Philippe Chaput. C’est un élément qu’il ne faut pas négliger considérant que de plus en plus de gens occupent des emplois de nature intellectuelle.»