
Mise en marché sous le nom de HandyScan par la compagnie Creaform, cette caméra 3-D numérise les objets par balayage laser et les reconstruit en temps réel à l'écran d'un ordinateur. L'appareil effectue 180 000 mesures à la seconde et le fichier numérisé qui en résulte peut ensuite être utilisé ou modifié à volonté par l'usager, ce qui laisse entrevoir des applications intéressantes du côté industriel, médical et même muséal. La particularité de ce système est que son capteur télémétrique, qui pèse moins d'un kilo et qui est tenu à la main, détermine lui-même sa position dans l'espace par reconnaissance de cibles disposées sur l'objet. Les autres appareils du genre nécessitent le recours à un système externe de positionnement qui les rend beaucoup moins pratiques à transporter et à opérer, sans compter le fait qu’ils coûtent cinq fois plus cher.
«Une fois par dix ans»
Dragan Tubic a effectué ses travaux de doctorat sous la supervision de Patrick Hébert et Denis Laurendeau, professeurs au Département de génie électrique et de génie informatique et membres du Laboratoire de vision et systèmes numériques. Le professeur Hébert a commencé à travailler à la mise au point de cette caméra alors qu'il était à l'emploi du Conseil national de la recherche du Canada dans les années 1990. Lorsqu'il a été embauché comme professeur à l'Université en l'an 2000, il avait développé un premier prototype du capteur. Il restait toutefois à trouver une façon d'effectuer la reconstruction interactive de la surface de l'objet, problème auquel s’est attaqué Dragan Tubic. «Au lieu de chercher de nouveaux algorithmes plus performants, il a proposé une nouvelle représentation des surfaces qui limite intrinsèquement la complexité de tous les algorithmes requis pour la modélisation interactive, explique le professeur Hébert. Il a résolu le problème de façon admirable.» De son côté, Denis Laurendeau signale que lors de la soutenance de thèse de Dragan Tubic, qui a eu lieu en mars dernier, des membres du jury ont vanté la thèse tant pour sa qualité que pour la portée des idées qui y sont proposées. «Des thèses d'une telle qualité ne se rencontrent qu'une fois par dix ans», a même déclaré un des examinateurs.
En 2003, l’équipe du LSVN et un de ses diplômés, Éric Saint-Pierre, ont entrepris de transformer l’appareil mis au point dans leur laboratoire en prototype commercial grâce à un coup de pouce du programme Precarn, un consortium national qui finance des projets de collaboration entre les universités et les industries dans le secteur des systèmes intelligents. Puis, par l'entremise de la Société de valorisation des applications de la recherche (SOVAR), les chercheurs ont pris contact avec une jeune entreprise de Lévis, Creaform, spécialisée en numérisation 3-D. En 2005, l'Université a accordé une licence à Creaform qui, en échange de redevances, utilise maintenant cette technologie dans son produit vedette, le HandyScan, lancé à l’automne 2005. Le 6 octobre dernier, Creaform annonçait la vente de la centième unité de sa caméra.
Éric Saint-Pierre et Dragan Tubic travaillent maintenant à temps plein pour une entreprise qui a été créée pour assurer le transfert de cette technologie vers Creaform. «Nous espérons que ce canal indépendant créé entre l'entreprise et l'Université permettra de maintenir l'industrie licenciée hautement compétitive par une R&D industrielle soutenue et qu'il facilitera le transfert de futures percées issues du LVSN», déclare Patrick Hébert.