
Les analyses des chercheurs ont montré, sans surprise, que la grandeur de la maison, son âge et sa proximité des services figurent sur la liste des cinq plus importants facteurs qui influencent le prix d'une propriété. Par contre, il est plus étonnant d'apprendre que, toute autre chose étant égale par ailleurs, le revenu du ménage qui fait l'acquisition de la propriété vient au cinquième rang de cette même liste. L’article que les chercheurs publient à ce sujet dans un récent numéro du Journal of Geographical Systems établit même que, pour une maison équivalente d’un quartier équivalent, les ménages paient une «prime» de 1,6 % pour chaque tranche supplémentaire de 10 000$ de revenu. Ainsi, là où un ménage qui dispose d’un revenu de 50 000 $ paie une maison 200 000$, un ménage qui a un revenu de 100 000 $ accepte de payer, toujours pour une maison équivalente située dans un quartier équivalent, 216 000 $.
«Les ménages qui ont des revenus élevés passent peut-être moins de temps à chercher une maison ou peut-être marchandent-ils moins, avance François Des Rosiers. À l’inverse, les ménages qui ont un budget serré n’ont pas d’autres choix que d’attendre la bonne affaire.» D’autres résultats de l’étude tendent à appuyer cette hypothèse. En effet, les ménages qui font l’acquisition d’une première maison et les acheteurs qui ont moins de 30 ans paient 4 % de moins pour une propriété équivalente.
Par ailleurs, le charme de certains «beaux quartiers» de Québec se paie et les trois chercheurs y ont accolé un prix. Les acheteurs paient une prime de 4,4 % pour chaque tranche de 10 % de détenteurs de diplômes universitaires résidant dans le quartier. Si l’acheteur a lui-même un diplôme universitaire, il paie 1,8 % de plus pour la même propriété. «Évidemment, l’acheteur ne connaît pas le taux de diplômés universitaires dans les environs de la propriété qu’il veut acheter. Par contre, il connaît intuitivement le statut social du quartier, dont la prévalence de diplômés universitaires est un indice encore plus révélateur que le revenu des résidents», précise le professeur Des Rosiers. Les acheteurs acceptent donc de payer une prime assez élevée pour jouir d’une homogénéité sociale. «Dans le domaine de l’habitation, le dicton «Qui se ressemble se rassemble» est encore plus vrai qu’ailleurs», ajoute le chercheur du CRAD. La prime qu’acceptent de payer les acheteurs pour résider dans certains quartiers élève une barrière financière qui accentue la ségrégation ou l’homogénéité sociale, selon le côté de la clôture où on envisage la situation.
Les valeurs rapportées dans l’étude sont propres à la région de Québec et à la période qu’elle couvre, précisent ses auteurs. «Le taux d’inoccupation était élevé et il y avait beaucoup de propriétés à vendre, souligne François Des Rosiers. Dans pareille situation, les acheteurs ont plus de pouvoir de négociation et le profil de l’acheteur, notamment la valeur qu’il accorde à certains attributs de la propriété, se répercute sur le prix des maisons. Depuis 2000, nous sommes dans un marché de vendeurs, mais on tend progressivement vers une situation d’équilibre, laquelle correspond à un ratio de 8 à 10 vendeurs pour 1 acheteur.»