
Le médicament coupe-faim Qsymia contient deux molécules actives dont le topiramate, un anticonvulsant prescrit aux personnes souffrant d'épilepsie. Les personnes qui prennent du Qsymia perdent en moyenne 10% de leur poids.
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Des scientifiques de l'Université Laval et du University of Texas Southwestern Medical Center ont uni leurs efforts pour comprendre par quel étrange détour le topiramate, une molécule d'abord homologuée pour le traitement de l'épilepsie, parvenait à faire perdre du poids. Les résultats de leurs travaux, qui viennent de paraître dans la revue Obesity, révèlent notamment que le mode d'action de cette molécule diffère de celui de la molécule coupe-faim contenue dans l'Ozempic et le Wegovy.
Le topiramate est un anticonvulsant qui a été homologué aux États-Unis en 1996 pour le traitement de l'épilepsie. Au fil des ans, on lui a découvert des vertus pour d'autres problèmes de santé tels que les migraines, le trouble bipolaire et l'alcoolisme.
«C'est en constatant une perte de poids chez une partie des personnes qui prenaient du topiramate pour traiter l'épilepsie que son recours dans le traitement de l'obésité a été envisagé», rappelle Natalie Jane Michael, professeure à la Faculté de pharmacie de l'Université Laval et chercheuse au Centre de recherche de l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec-Université Laval.
En 2012, une entreprise américaine a mis en marché un médicament contre l'obésité qui combine le topiramate et le phentermine. Ce médicament, appelé Qsymia, est maintenant vendu aux États-Unis, en Corée du Sud, en Suède, en Norvège, en Pologne, au Danemark, en Islande, en Finlande et aux Émirats arabes unis. «Même si ça fait plus d'une décennie qu'il est utilisé pour traiter l'obésité, on ne connaissait toujours pas son mode d'action dans le cerveau», souligne Natalie Jane Michael.
Pour trouver réponse à cette question, la professeure Michael et ses collaborateurs ont eu recours à une technique d'électrophysiologie qui permet de mesurer directement l'activité électrique des neurones dans le cerveau de souris transgéniques. «Nous avons découvert que le topiramate inhibe une population de neurones (NPY/AgRP) bien connue pour déclencher l'appétit. Contrairement à d'autres molécules coupe-faim comme le sémaglutide (Ozempic) ou le liraglutide (Saxsenda), le topiramate n'agit pas sur les neurones qui régulent la sensation de satiété.»
Les personnes qui prennent du Qsymia perdent en moyenne 10% de leur poids. «Les résultats sont très variables, souligne toutefois la professeure Michael. Chez certaines personnes, la perte de poids est négligeable, alors que chez d'autres elle peut atteindre 20% du poids corporel. Ça dépend du bagage génétique personnel et de la réponse individuelle à la prise alimentaire. Cette variabilité est aussi observée avec l'Ozempic. Il arrive que certaines personnes gagnent du poids lorsqu'elles prennent ce médicament. Mieux cerner le mode d'action des molécules coupe-faim pourrait contribuer à mieux personnaliser les traitements et à optimiser leurs bénéfices pour les personnes vivant avec l'obésité.»
L'étude parue dans la revue Obesity est signée par Moein Minbashi Moeini, Olivier Lavoie, Alexandre Caron et Natalie Jane Michael, de l'Université Laval, et Kevin Williams, du University of Texas Southwestern Medical Center.