«Un bilan très positif. Je suis encore en apprentissage. Cette première session me motive à poursuivre à la deuxième session et à devenir illustratrice scientifique.»
C'est en ces termes que l'étudiante Élodie Ouellet-Belleau, inscrite au programme de diplôme d'études supérieures spécialisées (DESS) en illustration scientifique, parlait, il y a quelques semaines, de la session d'automne qu'elle venait de terminer. Ce diplôme est offert par l'École de design de l'Université Laval depuis septembre dernier. Il est le seul programme du genre offert en français au Canada et l'un des rares au niveau universitaire au pays.
Le parcours d'études d'Élodie Ouellet-Belleau comprend trois parties: d'abord les programmes arts-études au niveau secondaire, où elle s'initie entre autres au dessin, ensuite les sciences de la nature au cégep, enfin le baccalauréat en sciences biomédicales à l'Université Laval ainsi qu'un certificat sur mesure en visualisation de l'information.
«Vers la fin de mes études universitaires, rappelle-t-elle, je me suis rendu compte que j'aimais beaucoup la science, comprendre et résumer les concepts. C'est alors que j'ai découvert l'illustration scientifique. Je suis ensuite entrée sur le marché du travail. Deux ans plus tard, j'avais envie de perfectionner davantage ma technique quand le DESS est arrivé.»
L'automne dernier, l’un de ses projets de session portait sur un météoroïde entrant dans l'atmosphère terrestre. «Cette grosse roche va se désintégrer, dit-elle, mais selon sa composition, elle peut aussi se fragmenter et fondre. J'ai davantage voulu montrer ce phénomène. Je me suis inspirée, pour mon projet, d'une conférence sur les débuts de l'univers. J'ai aussi fait beaucoup de recherches dans des articles scientifiques.»
Selon elle, personne ne sait vraiment ce qui se passe au niveau de la roche lorsqu'elle entre dans l'atmosphère terrestre. «Mais les météorites tombées sur Terre sont récupérées par les chercheurs, explique-t-elle. En laboratoire, elles sont utilisées par exemple à l'aide du tunnel au plasma qui va les chauffer à des températures qui se rapprochent de celles de leur entrée dans l'atmosphère.»
Élodie Ouellet-Belleau a un faible pour les sujets invisibles à l'œil nu, que ce soit les trous noirs ou la théorie de la relativité générale. «C'est sûr, souligne-t-elle, qu'imaginer un phénomène sur lequel personne n'a une réponse exacte ajoute une charge plus grande au niveau de la recherche, de la créativité et de l'imagination.»
Des images d'une grande efficacité
En quelques mots, l'illustration scientifique permet de donner un visage à quelque chose d'abstrait ou d'infiniment petit. Elle permet aussi d'expliquer, que ce soit un mécanisme, une interaction ou un phénomène complexe.
De nos jours, la recherche scientifique occupe une grande place dans nos sociétés. Par conséquent, les scientifiques ont de plus en plus recours à l'illustration pour communiquer les résultats de leurs recherches. Les chercheurs, mais aussi les médias d'information spécialisés, les maisons d'édition, les entreprises pharmaceutiques et biotechnologiques, sans oublier les programmes de science, du secondaire à l'université.
Le diplôme d'études supérieures spécialisées en illustration scientifique s'étend sur 10 mois consécutifs. Ce programme représente 30 crédits et se distingue par son approche pluridisciplinaire couvrant quatre domaines scientifiques majeurs: l'espace, la Terre, le vivant et l'humain.
«Je viens du monde de la recherche biomédicale et c'est documenté que les illustrations scientifiques, de par leurs qualités, peuvent faire avancer la science», soutient le chargé d'enseignement Jean-François Bolduc, coresponsable du DESS. Ce dernier insiste sur la pluridisciplinarité du programme. «Nous avons regardé ce qui se faisait ailleurs, explique-t-il. Plusieurs programmes sont spécialisés dans un domaine. On voit beaucoup de médical au Canada et aux États-Unis. Nous, nous voulons former des professionnels qui auront touché à peu près à tout.»
Le DESS se situe au croisement de la science, de l'art et du design. «Les candidats doivent avoir un vif intérêt pour la science, de très bonnes aptitudes en dessin et une bonne maîtrise des principes de design de l'illustration, indique-t-il. Ce bagage permet de réaliser une illustration qui sera un bon outil de communication.» Il ajoute que les futurs diplômés seront des professionnels à part entière qui collaboreront étroitement avec les scientifiques «comme des personnes qui proposent, qui suggèrent en s'appuyant sur des principes de design connus et reconnus».
Une cohorte motivée
La cohorte actuelle est composée de six étudiantes à temps plein et d’une étudiante à temps partiel. Deux d'entre elles ont fait le baccalauréat en design graphique. Une autre est titulaire d’une maîtrise en microbiologie-immunologie. Une autre a réalisé une formation en enseignement des arts.
«L'intérêt pour la science est l'une des conditions d'admission au DESS, souligne Jean-François Bolduc. Cet intérêt est présent et palpable dans la cohorte actuelle. Le niveau de connaissances varie. Certaines sont très fortes en science, ayant même travaillé dans un laboratoire. On ne veut pas en faire des scientifiques. Par contre, dans tous les cours, on les encourage à aller chercher l'information juste et à se documenter auprès de scientifiques.»
Ce dernier ajoute que le DESS se termine à l'été, non pas sous la forme d'un stage mais d'un projet intégrateur qui amènera les étudiantes à collaborer avec un scientifique ou un professionnel qui a un besoin d'illustrations.
Une palette de médiums est proposée à celles et ceux qui s'inscrivent au DESS, que ce soit le crayon à mine, la gouache et l'aquarelle ou des logiciels. «Il reste important de pratiquer les techniques classiques tout en tendant vers le numérique, indique Jean-François Bolduc. Il existe de nouveaux outils comme le IPad, qui est devenu un très bon ami de l'illustrateur. Tous ces outils peuvent se complémenter les uns les autres.»
Selon lui, plusieurs collaborations sont à faire avec des spécialistes du campus. «Médecine, médecine dentaire: on va ratisser large, y compris du côté des sciences humaines et sociales», explique le chargé d'enseignement.
Cet automne, à la suite de la conférence donnée par le conservateur du Musée de géologie René-Bureau de l'Université Laval, Olivier Rabeau et les étudiantes ont pu prendre des météorites dans leurs mains. «Ça les a allumées, dit-il, et stimulé leur imaginaire.»