Le Canada devrait interdire le marketing portant sur la malbouffe partout où les enfants peuvent y être exposés, que ce soit à la télévision, dans les médias sociaux ou sur les panneaux d'affichage. C'est l'une des principales conclusions d'une étude menée auprès d'une cinquantaine de spécialistes en nutrition à travers le Canada rendue publique le 20 mars par une équipe de la Faculté des sciences de l'agriculture et de l'alimentation de l'Université Laval.
L'étude, réalisée dans le cadre d'un programme de recherche financé par les Instituts de recherche en santé du Canada, recommande également un meilleur financement pour les programmes d'alimentation scolaire, l'imposition de limites sur le sel, le sucre et les gras saturés utilisés dans la restauration et les aliments préemballés ainsi que la mise en place d'une taxe sur les boissons sucrées, entre autres mesures.
Dirigée par la professeure Lana Vanderlee, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les politiques visant une saine alimentation, l'étude intitulée Food-EPI Canada 2023 avait pour principal objectif d'évaluer les progrès du Canada en matière de politiques publiques visant à créer un environnement alimentaire sain.
Les auteurs du rapport constatent que le Canada a posé des gestes concrets dans certains domaines au cours des dernières années, notamment en ce qui a trait à l'interdiction des huiles partiellement hydrogénées dans les aliments, à la réglementation de l'étiquetage sur les produits emballés et à la révision du guide alimentaire canadien basée sur des données scientifiques récentes.
Malgré ces nouvelles positives, l'alimentation de la population canadienne demeure problématique à bien des égards: 78% des personnes âgées de 12 ans et plus ne consomment pas un minimum de cinq portions de fruits et légumes par jour, 58% de la population consomme plus de sel que ce qui est recommandé et 46% de l'apport énergétique des Canadiens provient d'aliments ultra-transformés.
«Le chemin parcouru au cours des dernières années ne doit pas nous faire perdre de vue l'immense travail qu'il reste à faire afin d'assurer un environnement alimentaire de qualité pour l'ensemble de la population et tout particulièrement les enfants», souligne la professeure Vanderlee, qui est aussi chercheuse au Centre NUTRISS de l'Université Laval. «Même dans une province comme le Québec, où il est interdit de cibler les enfants dans les campagnes de publicité alimentaire, les jeunes sont exposés à une quantité énorme de publicité portant sur la malbouffe qui influence négativement leurs attitudes, leurs préférences et leurs habitudes de consommation. Pourtant, un nombre grandissant d'études confirment que limiter l'exposition des enfants à ce type de publicité peut avoir un impact positif important sur la qualité de leur alimentation. Il serait temps que le Canada suive l'exemple de pays comme le Royaume-Uni ou le Mexique, qui proposent des politiques très strictes en la matière.»
«Des actions politiques audacieuses, globales et concertées seront nécessaires si on souhaite créer des environnements alimentaires sains pour toutes et tous et faire de véritables progrès dans la lutte contre les maladies liées à l'alimentation telles que le diabète, les maladies cardiovasculaires et de nombreux types de cancers», conclut la professeure.