Plus on prend de l'âge, plus on risque de souffrir d'un rétrécissement sévère de la valve qui sépare le ventricule gauche d'une artère majeure du corps, l'aorte, causant ainsi une insuffisance cardiaque. Des chercheurs de l'Université Laval ont toutefois une bonne nouvelle pour tous les nonagénaires. Le risque de mortalité associé au remplacement de la valve aortique par cathéter n'est pas plus élevé chez les personnes de ce groupe d'âge que chez les patients plus jeunes, et leurs chances de vivre au moins 5 ans après l'intervention sont similaires.
C'est ce que rapporte, dans The American Journal of Cardiology, une équipe regroupant des chercheurs américains, des chercheurs suisses et les professeurs Philippe Pibarot et Josep Rodés-Cabau, de la Faculté de médecine de l'Université Laval et du Centre de recherche de l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec-Université Laval (IUCPQ-UL).
Ces chercheurs ont uni leurs efforts pour analyser l'issue de près de 6900 remplacements de valve aortique effectués dans les 9 centres hospitaliers auxquels ils sont affiliés. Parmi tous ces patients, 591 étaient âgés entre 90 ans et 100 ans au moment de l'intervention. «Plusieurs études ont déjà démontré que le remplacement de la valve aortique par cathéter était faisable et sécuritaire pour les patients de ce groupe d'âge, mais il y avait peu de données sur leur survie à long terme», souligne le professeur Rodés-Cabau.
Les analyses des chercheurs ont révélé que le taux de mortalité 30 jours après l'intervention avoisinait 3% dans le groupe des nonagénaires tout comme dans le groupe de 6305 personnes de moins de 90 ans (l'âge moyen dans ce groupe était de 80 ans). «Après 5 ans, le taux de mortalité se situait à environ 28% dans les deux groupes et l'amélioration des capacités fonctionnelles et de la qualité de vie était comparable», ajoute le professeur Rodés-Cabau.
On peut s'étonner que des patients plus âgés survivent aussi bien que les plus jeunes, mais il y a une raison à cela, poursuit-il. «Les nonagénaires chez qui on remplace la valve aortique sont bien sélectionnés. Si le patient est fragile, qu'il a trop perdu de masse musculaire, qu'il a déjà fait des accidents vasculaires cérébraux ou que ses reins fonctionnent mal, les risques dépassent les avantages et il est préférable de ne pas réaliser l'intervention. Par contre, chez les patients qui ont une bonne santé, l'âge n'est pas un obstacle.»
Le professeur Rodés-Cabau, qui est cardiologue et hémodynamicien, pratique régulièrement des remplacements de valve aortique par cathéter, notamment chez des patients très âgés. «Avant l'intervention, ces personnes souffrent d'insuffisance cardiaque, elles se fatiguent rapidement, elles peuvent avoir des douleurs thoraciques ou des difficultés à respirer, ce qui fait qu'elles doivent souvent consulter aux urgences. Le remplacement de valve aortique par cathéter est le seul traitement qui existe pour leur condition et il produit une amélioration nette de leur qualité de vie. Aucun patient ne devrait se voir priver de cette intervention uniquement sur la base de son âge.»