Les océans ont capté 40% de tout le carbone émis par la combustion des énergies fossiles utilisées jusqu'à maintenant par l'humanité. Encore aujourd'hui, ils captent annuellement plus de carbone que toutes les forêts humides des régions tropicales et tempérées de la planète. Toutefois, l'importance de la captation et de la rétention du carbone par les océans pourrait diminuer en raison des perturbations induites par les changements climatiques au sein même des océans.
«On ne sait pas encore dans quelle mesure la contribution des océans à la captation du carbone sera affectée par ces changements, notamment par la fonte des glaciers et de la glace de mer, ni comment cela va modifier notre capacité d'atteindre les cibles de réduction que nous nous sommes fixées pour la hausse des températures au cours des prochaines décennies», commente Jean-Éric Tremblay, professeur au Département de biologie de l'Université Laval, directeur de l'Institut nordique du Québec et codirecteur scientifique de Québec-Océan.
Cette question est au coeur des travaux que réaliseront, au cours des 7 prochaines années, quelque 170 chercheurs de quatre universités qui participeront au projet «Transformer l'action pour le climat». Ces équipes de l'Université Dalhousie, de l'Université Laval, de l'Université du Québec à Rimouski et de l'Université Memorial de Terre-Neuve, dirigées par la chercheuse Anya Waite de l'Université Dalhousie, disposent d'un financement de 154 M$ du Fonds d'excellence en recherche Apogée Canada pour mener à bien leurs travaux.
Les équipes sillonneront les eaux de l'Atlantique Nord, depuis la baie de Baffin jusqu'à l'estuaire du Saint-Laurent, pour documenter les processus dynamiques qui interviennent dans la captation et la rétention du carbone. «Les appels à projets qui seront lancés permettront de préciser la programmation scientifique ainsi que la liste des chercheurs de l'Université Laval qui y participeront. Nous savons déjà que l'expertise des chercheurs de l'Université Laval en océanographie nordique sera mise à contribution», souligne le professeur Tremblay, qui agit comme directeur scientifique associé au sein de la direction de Transformer l'action pour le climat.
L'un des projets fédérateurs qui sera mené par les équipes de l'Université Laval consiste à documenter les processus océanographiques qui se déroulent dans la baie de Baffin. «Cette baie agit comme gare de triage pour les eaux et les nutriments de l'Arctique et du Groenland, précise Jean-Éric Tremblay. Elle en garde une partie et elle laisse passer le reste, ce qui influence les caractéristiques du courant du Labrador et, conséquemment, tout ce qui se passe en aval dans l'Atlantique Nord et dans le Saint-Laurent.»
Le projet Transformer l'action pour le climat s'intéressera également aux technologies permettant d'augmenter la séquestration du carbone par les océans. Enfin, les chercheurs se pencheront sur les répercussions des changements appréhendés sur les communautés côtières, notamment sur les premiers peuples. «Ces travaux seront coréalisés avec ces communautés. Nous voulons savoir dans quelle mesure l'océan continuera de leur procurer des aliments sains. Pour les Inuits, par exemple, c'est une question fondamentale.»
Des chercheurs de l'Université Laval font partie d'un autre regroupement qui a décroché une subvention au dernier concours d'Apogée Canada. Leur projet porte sur le développement d'une intelligence artificielle robuste, raisonnante et responsable.