
Intitulée Cette charge qui ne dit mot, cette photo a été prise dans le cadre d'une thèse de doctorat à l'Université Laval, portant sur le rapport au travail des enseignantes du préscolaire et du primaire.
— Karine Bilodeau
À travers les images satellite et les grossissements microscopiques, une photographie de vie quotidienne s'est démarquée au concours La preuve par l'image, organisé par l'Acfas. Sur la vingtaine d'œuvres finalistes à cette compétition, qui célèbre le cliché comme moyen de communication scientifique, celle de Karine Bilodeau a remporté le prix du jury et celui du public. La chercheuse l'a prise dans le cadre de sa thèse, portant sur le rapport au travail des enseignantes du préscolaire et du primaire.
Karine Bilodeau explique être photographe à la base. «Je voulais réussir à amener cette passion-là dans ma recherche parce que j'aime les données visuelles.» Après avoir réalisé des entrevues individuelles avec des enseignantes, elle leur a demandé de photographier des aspects difficiles et invisibles de leur travail pour les rendre visibles. L'image primée est la seule à avoir été photographiée par la chercheuse, en collaboration avec une participante qui a eu besoin de son aide.
«Elle m'a demandé de lui rendre visite pour illustrer cette difficulté, cette idée de ne jamais arriver à être à la fois une bonne mère et une bonne enseignante, de ne jamais atteindre l'idéal dans les deux sphères. Elle m'a acceptée chez elle en s'excusant de la maison en désordre, une fin de semaine où elle avait beaucoup de travaux à corriger, où elle avait les enfants, en me disant: "C'est le temps, là!".»
La chercheuse a croqué ce moment en mars 2019, avant que le télétravail ne devienne répandu en raison de la pandémie. Elle a intitulé l'œuvre Cette charge qui ne dit mot.
— Karine Bilodeau, en parlant de l'enseignante qu'elle a photographiée

Karine Bilodeau a fait son doctorat à la Faculté des sciences de l'éducation à l'Université Laval et la photo lauréate est issue de sa thèse. Elle est aujourd'hui chercheuse postdoctorale et chargée de cours à l'Université de Montréal.
Karine Bilodeau se dit très reconnaissante envers ces enseignantes qui se sont engagées dans le projet et qui ont accepté de montrer leur vulnérabilité, de rendre visible ce qui est parfois tabou. Elle a reçu 76 photographies au total, «dont une de vomi», alors que l'enseignante a dû tout ramasser comme le concierge ne travaillait pas ce jour-là. Une autre montrait un plancher de salle de bain, parce que l'enseignante n'avait pas le temps d'aller aux toilettes sur ses heures de travail. La chercheuse a reçu des images de lavage à ramener à la maison, des captures d'écran de rendez-vous pour la famille pris en cachette en classe.
«Ce que racontent ces photos, c'est l'idée qu'on n'enlève pas son tablier de maman quand on sort de la maison et qu'on n'arrête pas d'être enseignante quand la cloche sonne. Ça devient difficile de quantifier ce qui appartient au travail domestique et au travail salarié», indique celle qui a aussi gagné le prix de la meilleure thèse de la Faculté des sciences de l'éducation, à l'Université Laval.
En plus de l'image gagnante de Karine Bilodeau, celles de Maxime Parot et d'Odessa Tanvé, aussi membres de la communauté universitaire, figurent parmi les photographies finalistes au concours de l'Acfas 2022, organisé en partenariat avec Radio-Canada, Espace pour la vie et le Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie du Canada.

Maxime Parot, auxiliaire de recherche à la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique de l'Université Laval, a soumis l'image Lignes et lignine: opération 30 000 volts. Elle montre un entrelacement de fibres nanométriques, obtenues à partir de la lignine, l'une des principales familles moléculaires composant le bois.
— Maxime Parot

Grand ménage neuronal est l'œuvre d'Odessa Tanvé, doctorante en neuroscience à l'Université Laval. Cette image microscopique permet de voir le développement du cerveau d'une larve de poisson-zèbre âgée de neuf jours.
— Odessa Tanvé