
La partie centrale de la constellation d'Orion montre des étoiles massives à différentes étapes de leur vie. La zone blanchâtre située au centre de l'image est la nébuleuse d'Orion, une région où se trouvent des étoiles très jeunes. Plus à droite, les trois étoiles sur une même ligne verticale – Alnitak, Alnilam et Mintaka – sont en milieu de vie. Dans le coin inférieur gauche se trouve Rigel, une étoile très brillante dont la vie tire à sa fin. Enfin, le nuage rougeâtre situé en périphérie est formé par la matière expulsée lors de l'explosion d'une étoile massive.
— Jean-François Fortin
Les étoiles massives naissent dans de gigantesques nuages moléculaires formés à 98% d’hydrogène et d’hélium. Après condensation, leur masse atteint de 8 à 150 fois la masse du Soleil, ce qui crée des conditions de température et de pression permettant des réactions nucléaires en leur cœur. «Une bonne partie des éléments plus lourds que le carbone qui existent dans l’Univers a été produit dans les étoiles massives, résume le professeur Drissen. Et ce processus se poursuit encore aujourd’hui. Par exemple, 10% de la masse de notre galaxie est encore sous forme de poussières moléculaires qui n’ont pas encore été condensées en étoiles. Dans d’autres galaxies, ce processus de formation d’étoiles en est encore à ses débuts.»
Deux autres particularités caractérisent les étoiles massives. Leur vie est jusqu’à 4 000 fois plus courte que celle d’étoiles comme notre Soleil et leur mort est abrupte et spectaculaire. Leur vie se termine par une explosion en supernova marquée par l’expulsion de matière à une vitesse atteignant des milliers de kilomètres par seconde. C’est ainsi que les éléments produits par ces étoiles se retrouvent dans les nuages moléculaires qui flottent dans l’espace intersidéral. Le cœur de ce qui était l’étoile massive devient alors une étoile à neutrons ou un trou noir.
La rédaction de Des vagues dans l’espace-temps s'est étalée sur près d'une décennie. «La rédaction d’un paragraphe peut nécessiter la lecture d’un chapitre de livre ou de trois ou quatre articles scientifiques. C’est très exigeant et très long», constate le professeur Drissen. Son ouvrage accorde une grande place à l'histoire des chercheurs qui ont étudié les étoiles massives et à l’évolution des instruments d’observation astronomique. «Il me semblait important de raconter comment notre façon de voir les choses s’était construite au fil du temps», précise-t-il.
Le livre est néanmoins au diapason des connaissances actuelles, comme en fait foi la section consacrée aux travaux sur les ondes gravitationnelles, ces oscillations de la courbure de l'espace-temps qui se propagent à grande distance de leur point de formation. Rappelons qu'entre 2015 et 2017, des équipes de chercheurs ont détecté à sept reprises des ondes gravitationnelles produites par la coalescence de trous noirs ou par la collision d'étoiles à neutrons. C'est grâce à ces vestiges d'étoiles massives qu'il a été possible d'observer directement ces ondes dont l'existence avait été prédite en 1915 par Einstein grâce à sa théorie de la relativité générale.
«Ma première rencontre avec les étoiles massives a eu lieu dans un cours d’astrophysique à l’automne 1982 alors que j’étais étudiant au baccalauréat à l’Université de Montréal, rappelle Laurent Drissen. Pour une raison que je ne comprenais pas à l’époque, ces étoiles m’intriguaient, assez pour que j’en fasse mon sujet de maîtrise et de doctorat. Par la suite, je leur ai consacré la plus grande partie de mes travaux comme chercheur universitaire. Je sais que je ne suis absolument pas objectif, mais je crois que ce sont les étoiles les plus intéressantes. En plus, elles apportent de la couleur dans les galaxies où elles se trouvent et elles créent de la beauté autour d’elles.»