
Une fois dans la circulation sanguine, les nanoparticules contenant un médicament partent à la recherche de leur cible. Leur efficacité est entravée par les réactions du corps, qui les considère comme des organismes pathogènes, et par des protéines du sang, qui se lient à leur surface.
— Illustration de Nicolas Bertrand
La combinaison de nanoparticules – des assemblages d'atomes faisant moins de 100 nanomètres de diamètre – et de drogues facilite le guidage de ces dernières vers les parties du corps où elles doivent agir. Cette nanotechnologie pourrait ainsi réduire les doses de médicaments administrées aux patients et, conséquemment, leurs effets secondaires. «Cette approche n'est pas une vue de l'esprit, elle est déjà utilisée dans certains vaccins et dans certains traitements contre le cancer, mais il reste du travail à faire pour en améliorer l'efficacité», souligne le professeur Bertrand.
L'un des problèmes est que l'organisme cherche à se débarrasser rapidement des nanoparticules, comme il le fait avec des virus ou des bactéries. Le foie et la rate les capturent et les éliminent, ce qui limite leur durée d'action. Un autre problème est que certaines protéines du sang se fixent à la surface des nanoparticules, modifiant leurs interactions avec les cellules du corps.
Pour les besoins de leur étude, les chercheurs ont utilisé une nanoparticule prometteuse qui a atteint le stade clinique, le PEG-PLGA. Il s'agit d'un complexe de deux polymères, l'acide poly(lactique-co-glycolique) (PLGA), qui forme le cœur de la nanoparticule, et le polyéthylène glycol (PEG), qui en constitue l'enveloppe. «Dans ce système, les drogues sont placées dans la matrice de PLGA, comme des pépites de chocolat dans une pâte à biscuits, explique Nicolas Bertrand. On les entoure d'une enveloppe de PEG pour les protéger. Au contact des molécules d'eau, ces polymères se décomposent, ce qui permet le largage graduel de la drogue.»
Les chercheurs ont créé une gamme de nanoparticules PEG-PLGA qui se distinguaient par leur taille ou par la densité de PEG dans leur enveloppe. Par la suite, ils les ont injectées à des animaux de laboratoire et ils ont suivi ce qu'il en advenait dans les six heures suivantes. Résultats? Peu importe la taille des nanoparticules, il existe un seuil – qui se situe à 20 chaînes de PEG par 100 nanomètres carrés – au-dessous duquel les nanoparticules sont rapidement éliminées. Des densités plus élevées de PEG n'augmentent pas le maintien des nanoparticules dans la circulation sanguine. «Il semble donc exister une valeur optimale qui confère une propriété à l'architecture des nanoparticules leur permettant de se maintenir de façon prolongée dans la circulation sanguine», constate le professeur Bertrand.
Contrairement à l'idée reçue, le système immunitaire inné jouerait un rôle mineur dans l'élimination des nanoparticules, ont découvert les chercheurs. Par contre, le maintien des nanoparticules dans le sang est affecté lorsque certaines protéines qui interviennent dans le transport des lipides se lient à leur surface. «Notre étude suggère des nouvelles avenues pour préparer des nanoparticules potentiellement plus efficaces comme vecteurs thérapeutiques. Elle fait aussi la lumière sur certains processus biologiques responsables de leur devenir dans l'organisme», résume le professeur Bertrand.
L'étude parue dans Nature Communications est signée par Nicolas Bertrand et l'étudiant-chercheur Philippe Grenier, de la Faculté de pharmacie, et par des chercheurs du MIT, de l'Université Harvard, de l'Université Stanford, du Brésil, de la Corée du Sud et de l'Arabie saoudite.