
Le mémoire de maîtrise en anthropologie de Geneviève Mercure porte sur les expériences et les discours de personnes ayant vécu des expériences paranormales.
Y croire ou ne pas y croire? Au-delà de ce questionnement, un fait demeure : les personnes dont l’existence est empoisonnée par la présence d’esprits maléfiques vivent dans la peur. Et la façon la plus efficace de chasser cette peur, ou du moins de la contrôler, est encore d’en parler à quelqu’un en qui on a confiance, comme on le ferait avec son psychologue. Car la parole possède le pouvoir de libérer, d’aider à y voir plus clair et, pourquoi pas, à chasser les fantômes. C’est l’une des conclusions à laquelle arrive Geneviève Mercure, dont le mémoire de maîtrise en anthropologie a porté sur les expériences et les discours de personnes ayant vécu des expériences paranormales.
«Ces personnes craignent souvent de passer pour folles ou encore qu’on ne les croie pas, dit Geneviève Mercure. Mais à un moment donné, cela devient trop lourd à porter. Quand elles trouvent quelqu’un qui les écoute sans les juger, c’est un poids de moins sur leurs épaules. Généralement, cela règle une grande partie du problème.»
Aux fins de son étude, Geneviève Mercure a mené des entrevues auprès de 13 témoins directs ou indirects d’événements dignes de figurer dans un film d’horreur. En fait, ses interlocuteurs lui ont raconté à peu près les mêmes histoires que celles décrites dans des séries télévisées populaires comme Ghost Hunters qui reconstituent des faits «réels»: maison centenaire traversée d’ombres inquiétantes, esprits maléfiques hantant le sous-sol d’une résidence, femme enceinte possédée par un mauvais esprit, routes bloquées par des entités inamicales, etc.
D’aucuns pourraient penser que ces témoins sont fortement influencés par ce qu’ils ont vu à la télévision et dans les films et en conclure que ce ne sont là qu’élucubrations. Pas Geneviève Mercure. Ce qui n’empêche pas qu’elle ait failli laisser tomber un participant lors d’une entrevue, car ce dernier faisait largement référence à des films en racontant son expérience. Mais elle s’est ravisée lorsqu’un médium lui a appris que, chez certains témoins, les films constituaient les seuls référents qu’ils avaient pour exprimer et imager ce qu’ils avaient vécu.
Quand ils décident de parler, les témoins d’événements paranormaux choisissent soigneusement leur confident. «S’ils ont décidé de me raconter leur histoire, c’était que je pouvais leur fournir l’anonymat que procure l’obligation de confidentialité de mon mémoire», rapporte l’anthropologue.
Dans les émissions de télé, les noms des victimes et des lieux sont souvent changés pour préserver l’anonymat des personnes. Selon Geneviève Mercure, il existe un effet pervers à vouloir rester dans l’ombre. «Si les gens souhaitent rester anonymes, cela provoque le doute quant à la véracité des faits, dit-elle. Mais s’ils se présentent à la lumière du jour, ils seront traités comme des parias.»
Interrogée sur ses propres croyances en la matière, ou sur ses réserves face à l’existence de fantômes, Geneviève Mercure demeure discrète. Elle précise toutefois qu’il ne lui appartient pas de mettre la parole de ses répondants en doute. «Ces gens m’ont fait confiance et cet aspect compte énormément pour moi.»