Nathalie Pavy, Betty Pelgas, Jérôme Laroche, Philippe Rigault, Nathalie Isabel et Jean Bousquet ont sondé le génome des conifères (gymnospermes) et ils l'ont comparé à celui des plantes à fleurs (angiospermes). Ces deux groupes de plantes terrestres, qui avaient un ancêtre commun, ont divergé il y 300 millions d'années.
Les chercheurs ont comparé la macrostructure du génome pour 157 familles de gènes présents à la fois chez les conifères et chez les plantes à fleurs. «La position et l'ordre de ces gènes nous permettent de jalonner le génome, un peu comme les 18 drapeaux sur un terrain de golf, et d'en étudier la conformation», explique Jean Bousquet.
Le fruit de cette étude, qui vient de paraître dans la revue scientifique BMC Biology, révèle que le génome des conifères semble figé dans le temps depuis au moins 100 millions d’années alors que celui des plantes à fleurs a connu d'importants chambardements pendant la même période. En fait, le génome des conifères compte huit fois plus de mouvements survenus avant 300 millions d'années qu'après cette date. «Ça ne signifie pas qu'il n'y a pas eu de changements à plus petite échelle, notamment des mutations dans les gènes, précise le professeur Bousquet. Toutefois, la macrostructure du génome des conifères a été d'une remarquable stabilité au fil des âges.»
Ce relatif immobilisme concorde avec ce que l'on sait de l'évolution de leur morphologie. «Les fossiles de conifères qui datent de 100 millions d'années ont la même apparence que les conifères contemporains, souligne le chercheur. Leur parure actuelle est celle qu'ils arboraient quand il y avait encore des dinosaures sur Terre.»
Cette grande stabilité concorde également avec le faible taux de spéciation des conifères. La planète abrite présentement 800 espèces de gymnospermes, dont 600 espèces de conifères. De leur côté, les plantes à fleurs comptent plus de 400 000 espèces. «Les conifères semblent avoir atteint très tôt un équilibre avec leur milieu, constate le chercheur. Aujourd'hui encore, sans artifice, ils connaissent du succès sur une grande partie de la planète, surtout dans les régions froides. À l'opposé, les plantes à fleurs sont engagées dans une course aux armements pour la survie et la reproduction qui fait peser sur elles de fortes pressions évolutives.»