
Il a beaucoup été question de soins de fin de vie au Québec au cours des dernières années, mais les connaissances d'une partie de la population sur la nature exacte de ces soins sont limitées. Des campagnes d'information aideraient les personnes à avoir une réflexion éclairée sur les soins qu'elles souhaitent elles-mêmes recevoir en fin de vie.
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Connaissez-vous la différence entre l'arrêt de traitement, la sédation palliative continue et l'aide médicale à mourir? Si les distinctions entre ces différentes pratiques de fin de vie ne vous semblent pas tout à fait claires, vous n'êtes pas seuls puisqu'environ le tiers de la population québécoise les confondrait, suggère une étude publiée dans la revue Palliative Care & Social Practice par une équipe de recherche de l'Université Laval.
Cette étude, dirigée par la professeure Diane Tapp de la Faculté des sciences infirmières de l'Université Laval, repose sur une enquête menée auprès de 872 hommes et femmes vivant au Québec. Ces personnes étaient âgées de 57 ans, en moyenne, 71% d'entre elles détenaient un diplôme d'études collégiales ou universitaires et 88% s'estimaient en bonne ou en très bonne santé.
Le questionnaire qui leur était soumis présentait d'abord la définition de l'aide médicale à mourir (administration, par du personnel de santé compétent, de substances à une personne en fin de vie, à la demande de celle-ci, dans le but d'entraîner son décès et d'ainsi soulager ses souffrances).
Le questionnaire présentait ensuite deux vignettes: la première décrivait le cas d'un homme atteint d'un cancer métastatique avancé et la seconde portait sur le cas d'une femme atteinte d'alzheimer. Différentes interventions étaient proposées à ces malades, notamment l'arrêt de traitement (cessation des soins pouvant maintenir la vie) et la sédation palliative continue (administration de substances visant à soulager des souffrances réfractaires, rendant ainsi la personne inconsciente jusqu'à son décès). Les personnes participantes devaient déterminer si chacune des interventions présentées était de l'aide médicale à mourir et si elle était légale au Canada.
L'analyse des réponses indique que 27% des personnes participantes ont confondu l'arrêt de traitement et l'aide médicale à mourir. De plus, 39% ont confondu la sédation palliative continue et l'aide médicale à mourir. Enfin, 34% ont indiqué que ces interventions étaient illégales au pays, ce qui est inexact. «Notre enquête a été effectuée il y a cinq ans, mais des rencontres que nous avons eues avec la population l'automne dernier suggèrent que la situation n'a pas changé», précise la professeure Tapp.
Il a beaucoup été question de soins de fin de vie au cours des dernières années et les sondages indiquent que les Québécois sont favorables à l'aide médicale à mourir, poursuit-elle. «Toutefois, les connaissances d'une partie de la population sur ces enjeux demeurent limitées», constate la professeure, qui est également chercheuse au Centre de recherche du CHU de Québec – Université Laval et codirectrice du Réseau québécois de recherche en soins palliatifs et de fin de vie.
Afin de permettre aux personnes d'avoir une réflexion éclairée sur les soins qu'elles veulent recevoir lorsqu'elles arriveront elles-mêmes en fin de vie, il faudrait mieux les informer dès maintenant sur ces enjeux, poursuit-elle.
— Diane Tapp
«Je ne suis pas contre l'aide médicale à mourir, mais les gens doivent savoir qu'il existe d'autres soins de fin de vie auxquels ils peuvent recourir pour améliorer leur qualité de vie et leur bien-être», ajoute-t-elle.
Une formation et un balado
La professeure Tapp et son équipe travaillent présentement à la production de deux sources d'information auxquelles la population aura accès. «Nous développons une formation, qui sera offerte à l'Université du 3e âge à partir de l'automne 2025, dans laquelle les enjeux de fin de vie seront abordés. Nous préparons aussi un balado sur la mort et le mourir. Sa diffusion aura lieu d'ici la fin de l'année 2025.»
D'ici là, les personnes qui souhaitent avoir plus d'information sur les soins de fin de vie peuvent se rendre sur des sites gouvernementaux comme celui du CIUSSS de la Capitale-Nationale. La professeure Tapp recommande aussi le balado Dernier souffle.
Les autres signataires de l'étude parue dans Palliative Care & Social Practice sont Gina Bravo, de l'Université de Sherbrooke, Catherine Filion, Ariane Plaisance, Vincent Couture, Sophie Dupéré, Marianne Beaulieu, Marie-Pierre Gagnon et Anouk Bérubé, de l'Université Laval, Audrey Chouinard, de l'Université de Montréal, et Pauline Roos, de la Haute École Arc Santé en Suisse.