Les plaquettes sanguines jouent un rôle important dans le développement de l'arthrite rhumatoïde. En effet, ces petits éléments du sang amplifient la réponse inflammatoire de l'organisme, ce qui accentue les douleurs articulaires des personnes souffrant de cette maladie. C'est ce que révèle une étude publiée dans l'édition du 29 janvier de la revue Science par une équipe de l'Université Harvard. Le premier auteur de l'étude, Éric Boilard, vient de se joindre au corps professoral de la Faculté de médecine de l'Université Laval.
Les plaquettes sont connues pour leur rôle dans la coagulation du sang, mais des études récentes ont révélé qu'elles étaient aussi impliquées dans l'athérosclérose, une maladie chronique inflammatoire qui cause un épaississement et une perte d’élasticité des parois artérielles. «Cet effet pro-inflammatoire des plaquettes nous a donné l'idée de vérifier si elles intervenaient également dans le développement de l'arthrite rhumatoïde, une maladie des articulations qui s'accompagne elle aussi d'inflammation», explique Éric Boilard.
C'est ainsi que les chercheurs ont découvert la présence de microparticules produites par les plaquettes dans le liquide qui entoure les articulations des personnes atteintes d'arthrite rhumatoïde. La concentration de ces microparticules est 300 fois plus élevée dans ce liquide que dans les vaisseaux sanguins adjacents. Par contre, elles ne sont pas présentes dans le liquide des articulations de personnes atteintes d'arthrose, une forme de rhumatisme provoquée par l'usure plutôt que par une réponse immunitaire de l'organisme.
Les chercheurs ont démontré l'effet inflammatoire des microparticules de deux façons. D'abord, lorsque ces microparticules sont ajoutées à un milieu de culture contenant des cellules provenant des articulations, elles induisent la synthèse de molécules caractéristiques d'une réponse inflammatoire. Ensuite, ils ont découvert qu'en réduisant l'abondance des plaquettes dans le sang d'animaux de laboratoire, ils parviennent à atténuer les symptômes de l'arthrite.
Les chercheurs sont parvenus à mettre la main sur une molécule, la glycoprotéine VI, qui joue un rôle déclencheur dans la production des microparticules sans entraver la fonction des plaquettes dans la coagulation sanguine. «Cette molécule constitue une nouvelle cible thérapeutique intéressante pour le traitement de l'arthrite rhumatoïde, souligne le professeur Boilard. On pourrait bloquer le mécanisme de production des microparticules sans craindre que les patients soient plus sujets aux hémorragies.»
Les traitements actuels contre l'arthrite rhumatoïde reposent sur le blocage de certaines fonctions immunitaires, ce qui peut entraîner des effets indésirables sur les mécanismes de défense de l'organisme, rappelle le chercheur. «Notre découverte laisse entrevoir une nouvelle approche dans le traitement de cette maladie. De plus, les chercheurs qui étudient les autres maladies inflammatoires voudront sans doute savoir si les microparticules sont en cause là aussi.»
L'arthrite rhumatoïde est une maladie qui provoque la déformation et la destruction des articulations. Les premiers symptômes peuvent se manifester dès l'âge de 25 ans, mais le plus souvent ils surviennent dans la quarantaine. Entre 0,3 et 1 % de la population en est victime.