
Daniel Côté, professeur au Département de physique, génie physique et optique, et membre du Centre de recherche Université Laval-Robert Giffard: «Il a fallu une bonne combinaison de biologie, de technologie et d'huile de coude pour arriver à ces résultats».
— Marc Robitaille
Les cellules souches du sang, retrouvées dans la moelle osseuse, sont des cellules non différenciées qui donnent naissance aux globules blancs, aux globules rouges ou aux plaquettes. Comme l’environnement immédiat dans lequel se retrouvent ces cellules conditionne leur devenir, il importe de savoir dans quelle niche de la moelle osseuse elles s’implantent et se multiplient. Ces informations sont essentielles pour mieux comprendre ce qui survient lors d’une leucémie — une maladie qui provoque une différenciation anormale et insuffisante des cellules du sang —, ou pour améliorer les chances de succès de la transplantation de cellules souches lors d’une greffe de moelle osseuse.
Dans un premier temps, les chercheurs ont prélevé des cellules souches chez des souris et ils les ont marquées à l’aide d’un marqueur fluorescent. Ces cellules ont par la suite été transplantées chez des souris dont les cellules souches avaient été préalablement détruites par irradiation, de façon à simuler ce qui survient lors d’une greffe de moelle osseuse. Restait un os à régler et il était de taille: comment obtenir des images de ces cellules à travers le tissu osseux? «Nous avons mis au point un système d’imagerie multiphotonique vidéo qui nous permet d’obtenir rapidement des images couleur nettes, même si l’animal bouge pendant l’enregistrement, grâce à une correction numérique, explique Daniel Côté. Ce sont des images tridimensionnelles grâce auxquelles on peut mesurer précisément la position des cellules souches par rapport aux vaisseaux sanguins ou aux ostéoblastes» (les cellules qui forment le tissu osseux).
Comme le pouvoir de pénétration des photons dans un os est limité, les chercheurs ont choisi d’étudier un os très plat situé au sommet du crâne de la souris. «On peut voir jusqu’à une profondeur de 150 microns, ce qui correspond à 40 à 60 % de la cavité de la moelle osseuse de cet os», précise le chercheur. Les images obtenues indiquent que les cellules souches ne se répartissent pas au hasard dans la moelle et qu’elles utilisent différentes niches selon le type de cellules sanguines qu’elles sont appelées à devenir et selon leur stade de différenciation.
C’est la deuxième fois depuis 2005 que Daniel Côté et ses collègues publient les résultats de leurs recherches sur les cellules souches de la moelle osseuse dans Nature. «Les aspects fondamentaux de nos travaux et leur application potentielle en médecine semblent plaire aux arbitres et aux éditeurs de cette revue, commente le chercheur. Il s’agit d’un bon exemple de collaboration multidisciplinaire qui repousse à la fois les limites de la biologie et des technologies d’imagerie optique.»