
La datation au carbone 14 a permis d'établir que les deux défenses mises en vente par la firme torontoise provenaient d'éléphants morts en 1977 ou 1978.
— Environnement Canada
Au Canada, la loi interdit de vendre de l'ivoire d'éléphants tués après le 3 juillet 1975, à moins d'être en mesure de prouver qu'il a été importé légalement. En novembre 2013, des agents d'Environnement Canada ont saisi deux défenses sculptées présentées comme des antiquités par la maison de vente aux enchères Five Star Auctions and Appraisals de Toronto. Le ministère a fait appel au CEN pour son expertise en datation au carbone 14 afin d'établir la date exacte du décès des pachydermes. Les analyses menées avec la collaboration de chercheurs de l'Université Columbia et de l'Université de la Californie ont révélé que les éléphants avaient été abattus en 1977 ou 1978.
Jugée coupable le 27 février 2015, la firme torontoise devra acquitter une amende de 18 750$ et remettre les défenses aux autorités. C'est la première fois au Canada que le recours à la datation au carbone 14 mène à une condamnation en vertu d'une loi sur la protection d'espèces sauvages.
La préparation des échantillons d'ivoire qui ont servi à la datation était un travail délicat, car il a fallu percer les deux oeuvres d'art. «Mon but était d'abîmer le moins possible ces belles défenses tout en permettant la meilleure analyse possible», explique Guillaume Labrecque. Avec les nouvelles technologies de datation au carbone 14, il suffit de quelques milligrammes de matière organique pour remonter le temps. «Pour des spécimens anciens, on obtient une précision de l'ordre de 15 à 25 ans, poursuit-il. Pour des spécimens récents, comme ces défenses d'éléphant, nous pouvons établir une date avec une précision de plus ou moins un an.»
Tout organisme vivant absorbe du carbone 14 de l'atmosphère. À sa mort, le carbone 14 présent dans ses tissus se désintègre à un taux connu des scientifiques. En analysant la quantité restante de cet élément dans l'échantillon, on peut savoir quand le spécimen était vivant ou établir le temps écoulé depuis sa mort. Guillaume Labrecque traite plus de 800 échantillons par an, comme du bois, des os et des coquillages fossiles. Fait insolite, l'an passé, il a effectué l'analyse d'un os humain à la demande d'un coroner du Québec. Les conclusions de l'enquête ne sont pas encore connues.