«Il s'agit d'une réalisation majeure pour notre institution et nous sommes extrêmement fiers d'atteindre ce cap historique en matière de lutte aux changements climatiques», a déclaré le recteur de l'Université Laval, Denis Brière, lors de l'annonce de la carboneutralité, le 24 novembre dernier.
En revendiquant une portée climatique nulle sur la société, l'Université rejoint le club sélect des universités carboneutres. Elle devient la première au Québec à afficher un bilan de zéro émission et la première au Canada à réaliser cette démarche sans y être contrainte par une loi.
C'est un geste d'une grande portée symbolique, indique le vice-recteur exécutif et au développement, Éric Bauce. «Si nous sommes capables de le faire collectivement dans une communauté de 60 000 personnes, nous pensons que l'on peut reproduire ce modèle-là un peu partout sur la planète. Si nous pouvons le faire, beaucoup de personnes peuvent le faire.»
Dès le 30 novembre, tous les yeux seront tournés vers la COP21, la Conférence de Paris sur le climat. «Cela envoie un signal pour dire aux gens que d'atteindre les grands objectifs de carboneutralité, c'est possible», ajoute Éric Bauce. «Pour nous, c'était un rêve de l'atteindre, il y a plusieurs années, et nous y sommes maintenant arrivés. Les universités doivent continuer à exercer ce rôle capital d'influence, car nous devons inspirer la société.»
Cette réalisation découle d'une réduction significative des émissions de gaz à effet de serre (GES) issus des activités opérationnelles et quotidiennes du campus. Au fil des ans, les chaudières ont été optimisées et une chaudière électrique a fait son apparition. Résultat? Une chute impressionnante de 27% des émissions de GES liées au chauffage entre 2006 et 2015.
Le pavillon Adrien-Pouliot a fait l'objet d'une série de travaux pour améliorer son efficacité énergétique, ce qui a entraîné une baisse de 30% de la consommation, dont une réduction de 80% de la vapeur. En parallèle, le stade TELUS-Université Laval, avec sa conception écoresponsable misant sur la ventilation naturelle et des fenêtres ouvrantes, constitue aussi un modèle.
Toute l'équipe du Service des immeubles a été mise à contribution pour planifier et réaliser les projets en visant la réduction des émissions de GES. C'est une stratégie gagnante, autant sur le plan financier qu'écologique. «Notre plan directeur en énergie allie la réduction des coûts et la baisse des émissions GES», explique le directeur adjoint du Service des immeubles, Gilles Pelletier. «Dans les années à venir, nous réduirons davantage les émissions associées au chauffage de nos bâtiments.»
Pour devenir carboneutre, l'Université a élaboré une stratégie en trois temps. Dès le départ, elle a mesuré ses émissions. Par la suite, une série de mesures ont été instaurées afin de réduire à la source les émissions de GES, en combinant l'optimisation des procédés de chauffage et l'efficacité énergétique des bâtiments.
La compensation complète la démarche. Pour contrebalancer les émissions restantes, l'Université a fait appel à une immense ressource: la forêt Montmorency. Grâce à l'implantation de méthodes novatrices et efficaces en gestion forestière sur ce territoire de 412 km2, l'Université s'est dotée de véritables puits de carbone. «La forêt Montmorency absorbe beaucoup plus de carbone qu'une forêt à l'état naturel en raison de son aménagement unique», détaille le directeur des opérations de la forêt, Hugues Sansregret. Cette approche rigoureuse de puits de carbone, basée sur un rendement forestier supérieur à la moyenne, fait d'ailleurs l'objet d'un suivi par un comité scientifique.
Finalement, l'Université séquestre l'équivalent de 13 945 tonnes de CO2 grâce à la forêt. Une collaboration avec le Séminaire de Québec, partenaire depuis toujours de l'Université, permet de retrancher 7550 tonnes supplémentaires au bilan. Dans le cadre d'une entente, le Séminaire a pris l'engagement de créer deux aires de conservation dans la Seigneurie de Beaupré, un territoire adjacent à la forêt Montmorency.
Afin d'afficher un bilan de carbone nul dès la fin de l'année financière 2014-2015, l'Université a opté pour l'achat de 5 143 tonnes en crédits de carbone. Cette dépense a été financée en puisant uniquement dans les économies d'énergie, assure le vice-recteur Éric Bauce. En échange de crédits de carbone, les sommes sont remises à ECOTIERRA et National ÉcoCrédit, deux entreprises québécoises engagées dans la compensation carbone par des projets de reforestation.
L'Université sera également partenaire avec la Forêt d'Arden, une coopérative de Lévis. L'organisme a fondé la Bourse du carbone Scol'ERE, par laquelle des élèves incitent leurs proches à effectuer des gestes pour limiter le réchauffement climatique. Le choix de ces organismes a été longuement réfléchi. «Toutes nos actions doivent avoir un lien avec notre mission. Nous investissons dans des organismes qui vont promouvoir, par exemple, l'engagement des jeunes en environnement. Nous n'achetons pas des crédits de carbone de basse qualité; nous achetons des crédits de carbone liés à notre mission. Quand nous disons que nous allons faire planter des arbres quelque part, nous allons le faire dans une optique de sensibilisation, qui va amener les notions de protection de l'environnement. Il y a un projet derrière tout cela», explique le vice-recteur exécutif et au développement.
Avec son titre de carboneutralité en main, l'Université Laval compte devenir un véritable banc d'essai des approches novatrices dans le domaine de la lutte aux changements climatiques. Les solutions trouvées ici sont exportables. L'Université ne cache d'ailleurs pas son désir d'inspirer d'autres organisations et de servir de modèle auprès des communautés et acteurs de la société.
Chose certaine, la carboneutralité est là pour rester. «C'est très important, car c'est tout un défi de maintenir la carboneutralité dans une organisation en évolution. Lorsque nous nous développons, nous améliorons notre patrimoine bâti, nous accueillons plus de monde, nous avons de la croissance. Il faut continuer à nous développer en ayant cet objectif de carboneutralité à la base de toutes nos actions. En soi, c'est un défi! Nous allons toujours devoir nous améliorer. Ce n'est qu'un début», conclut Éric Bauce.