Un prix en 2019, deux autres en 2020. Les étudiants à la maîtrise professionnelle en architecture inscrits à l’atelier de design Ambiances physiques se sont distingués à nouveau ce printemps au concours organisé par l’American Institute of Architects Committee on the Environment (AIA COTE). Cette compétition annuelle, dont les gagnants ont été annoncés le 21 mai à Washington, est organisée en partenariat avec l’Association of Collegiate Schools of Architecture. Elle récompense 10 projets d’atelier de design qui exploitent des concepts de carboneutralité grâce à l’intégration créative et innovante de stratégies de design telles que l’éclairage naturel, le chauffage et le refroidissement passifs, les matériaux écologiques, la gestion de l’eau et la gestion durable de l’énergie. Le concours est ouvert aux étudiants des États-Unis, du Canada et du Mexique. Cette année, plus de 400 projets ont été soumis, dont deux par des étudiants de l’Université Laval réalisés à l’hiver 2019. Deux autres équipes canadiennes étaient sur les rangs.
Les projets québécois portaient sur l’agrandissement de deux écoles primaires de la région de Québec. L’une d’elles est l’école Saint-Michel, inaugurée en 1953. Elle fait partie de l’échantillon du projet SCHOLA.ca, la plateforme d’expertise en architecture scolaire du Québec. Le projet étudiant, baptisé Matriochka, a été mené par Marie-Hélène Cliche, Michael Comtois et Étienne Vigneau.
«Le projet propose deux additions à une école existante: un pôle communautaire avec une nouvelle entrée sur la rue principale et un pôle culturel qui s’insère dans la portion boisée du site», explique la professeure Claude Demers, co-responsable, à l’École d’architecture, de l’atelier Ambiances physiques avec le professeur André Potvin. Les espaces proposés par les étudiants répondent aux besoins des écoles existantes, incluant classes, espaces polyvalents, service de garde, cafétéria, cuisine, auditorium, rangement et classe extérieure. «Le projet, poursuit-elle, développe une structure pouvant en grande partie être construite en usine, puis assemblée sur le site durant la période estivale. Le principe de gaufre de bois permet l’intégration sensible des systèmes électriques et mécaniques, ainsi que des systèmes environnementaux incluant des stratégies bioclimatiques comme l’éclairage naturel, le chauffage passif et le refroidissement passif.»
Selon la professeure, l’école devient un espace vivant. «Par l’espace vécu, dit-elle, les élèves se sensibilisent aux principes de développement durable. Les ambiances sont marquées par le rythme journalier de la lumière. On observe une réduction du bruit dans l’espace intérieur. La structure en moise permet de créer différents types d’ouvertures en fonction des besoins de lumière et de ventilation naturelle des espaces.»
Une formation préprofessionnelle
À la session d’hiver 2019, l’atelier Ambiances physiques avait comme objectif de répondre, de manière interdisciplinaire, au besoin pressant du Québec pour des écoles plus adaptables, moins coûteuses, évolutives et durables tenant compte des enjeux climatiques et sociocommunautaires.
«L’atelier offre une formation préprofessionnelle, souligne Claude Demers. D’une durée de 15 semaines, la formation, basée sur une démarche intégrée, est assez unique à l’École d’architecture. Il existe peu d’endroits où l’on enseigne les aspects sensibles de l’expérience spatiale liés aux considérations énergétiques dans un même atelier. Le professeur Potvin et moi-même avons élaboré une méthode de design qui intègre à la fois des outils d’analyse environnementale des bâtiments et les notions de bien-être des usagers relativement aux ambiances physiques telles que la lumière, le chauffage et l’acoustique.»
Le concept d’interdisciplinarité se situe au cœur de l’encadrement offert aux étudiants. Il explique une bonne partie de leur succès au concours de l’AIA COTE. L’atelier a profité de la contribution de la plateforme SCHOLA.ca, et de la participation de professeurs et d’étudiants de génie mécanique et de génie civil de l’Université Laval. Des professionnels externes se sont aussi joints à l’équipe, soit un architecte, un ingénieur en construction bois et deux experts en construction modulaire. Une chaire industrielle de recherche, une chaire de leadership en enseignement et le projet Sentinelle Nord ont aussi mis la main à la pâte.
«Comme professeurs, André Potvin et moi sommes très présents, indique-t-elle. Les étudiants répondent très bien aux défis de l’atelier, ils sont stimulés et enthousiastes. On leur en demande beaucoup, mais ils sentent que c’est sérieux. Ils étaient émerveillés de voir l’équipe de collaborateurs passionnés par ce qu’ils enseignaient.»
Dans leurs projets, les étudiants ont effectué des simulations à l’aide d’une série d’outils analogiques, comme de nombreuses maquettes découpées numériquement, et d’outils numériques comme des logiciels et des feuilles de calcul. Ils ont aussi recouru à des procédures appelées règles de pouce qui leur ont permis d’améliorer les concepts tout au long de la session.
Une école qui date de 1952
L’autre projet de l’Université Laval porte le nom de Copain-Copain? Il a été réalisé par Melaine Niget, Audrey Rochon et Anton Zakharov, qui se sont inspirés de l’école Joseph-Paquin, un bâtiment qui date de 1952. Cette école fait également partie de l’échantillon du projet SCHOLA.ca.
«Le projet, explique Claude Demers, développe un système constructif et adaptatif permettant deux principes: l’empilement, pour favoriser l’insertion des circulations verticales et des puits de lumière, et la juxtaposition, pour connecter latéralement les espaces créés entre eux et avec l’environnement extérieur.»
L’ajout proposé par les étudiants permet l’aménagement d’une cour intérieure végétalisée. Cette cour crée un ilôt de fraîcheur où il est possible de faire de l’enseignement, à l’abri des bruits urbains et de la chaleur.
«Le projet, poursuit-elle, illustre la versatilité du système constructif à offrir une diversité d’ambiances dans six unités habitables: la pergola, la coursive, la serre, le parcours, la classe, la cour. Les solutions visent à limiter les déperditions énergétiques du bâtiment par un usage étudié de la fenestration, tout en répondant aux besoins des usagers pour optimiser l’usage de la lumière naturelle et créer des vues sur l’extérieur.»
La pergola permet la lecture et les devoirs à l’extérieur, même par une journée de pluie. La serre, baignée de soleil et connectée à la cour intérieure, permet la production de nourriture pour les élèves de l’école.