«J’ai vraiment senti le contact se créer, un lien naître simplement en l’observant», confirme Joëlle Ouellette. Adepte du dessin depuis sa plus tendre enfance, la jeune fille, qui démarre son baccalauréat en communication graphique, découvre une nouvelle façon d’appréhender la réalité avec ces séances de modèle vivant. Au-delà des techniques propres au dessin et des précieuses informations sur l’anatomie humaine permettant de schématiser rapidement un personnage, Marie Lessard cherche surtout à affûter le regard de ses étudiants. «Le dessin d’observation nourrit l’imaginaire, confie-t-elle. Rien n’est banal si on sait bien regarder, et même on découvre des beautés inattendues. Le temps pris pour dessiner nous permet de regarder le monde de façon unique.»
À l’entendre, cette pratique artistique favorise la créativité sous toutes ses formes; elle s’apparente à une gymnastique du cerveau. L’enseignante invite donc ses étudiants à tenir un carnet personnel pour garder leur esprit en alerte, et crayonner le plus souvent possible. Mais au fait, le dessin se laisse-t-il facilement apprivoiser? «Certains étudiants se trouvent malhabiles au début du cours, admet Marie Lessard. Très vite, ils se rendent compte des progrès accomplis en s’abandonnant à ce qu’ils regardent.» Les techniques enseignées les guident également, notamment les schématisations de groupes musculaires. Patiemment, la professeure dissèque le corps humain un crayon à la main, soulignant une attache de muscle dans le dos, le rôle de la taille comme pivot. Ainsi guidés, les étudiants apprennent à tracer rapidement les lignes directrices du corps, de manière à pouvoir esquisser une silhouette réaliste. Un outil très pratique lorsqu’il faut rapidement expliquer une idée de dessin ou de composition d’image à un client, notamment pour les futurs graphistes. À l’heure du règne de l’informatique, le cours de dessin ramène donc les étudiants vers des matériaux plus traditionnels. Ils découvrent le poids du papier, sa texture, son épaisseur, mais aussi la variété des crayons, comme le fait remarquer Alexei Podgouzov, un étudiant de première année en communication graphique, épris de dessin. «J’ai pu explorer le graphite qui donne une ligne très grasse, le crayon-feutre au fini très achevé, les crayons à aquarelle. Des méthodes dont je vais désormais pouvoir me servir.»