10 février 2025
Maux de dos: les interventions psychologiques fonctionnent... quand elles sont offertes aux bonnes personnes
Les personnes anxieuses, dépressives ou enclines à imaginer le pire tirent davantage profit des interventions qui combinent des approches physiques et psychologiques
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— Getty Images/People Images
Croire que bouger empirera notre mal, être convaincu que la lancinante douleur qui nous tenaille persistera et empoisonnera notre existence à jamais, s'inquiéter des répercussions sociales et financières de notre état, envisager l'avenir de façon très sombre, voilà le type de pensées qui occupent l'esprit de bien des gens aux prises avec des maux de dos. Et les spécialistes de la santé seraient mal avisés de ne pas en tenir compte dans leurs interventions, suggère une étude publiée par une équipe de l'Université Laval dans le Journal of Orthopedic & Sports Physical Therapy.
Dans les pays occidentaux, plus de 8 personnes sur 10 souffriront de maux de dos à un moment de leur vie. Des problèmes psychologiques comme l'anxiété et la dépression sont présents chez 30% des personnes atteintes de lombalgie et ils sont associés à de mauvais pronostics de guérison.
«Lorsque des interventions qui combinent des composantes psychologiques et biomécaniques sont offertes à tous les patients qui souffrent de lombalgie, leur efficacité est modeste et elle diminue avec le temps, ce qui laisse planer des doutes sur leur valeur à long terme. Nous avons voulu savoir ce qui en était lorsque ces interventions ciblaient uniquement les personnes chez qui la dimension psychologique des maux de dos était présente», explique le responsable de l'étude, Hugo Massé-Alarie, professeur à l'École des sciences de la réadaptation et chercheur au Centre interdisciplinaire de recherche en réadaptation et intégration sociale de l'Université Laval.
Le professeur Massé-Alarie et son équipe ont effectué une revue de la littérature scientifique portant sur l'efficacité des interventions avec composante psychologique chez des sujets avec lombalgie qui présentaient des facteurs de risques psychologiques. Ils ont aussi effectué une méta-analyse à l'aide des données recueillies. À la lumière des 29 études scientifiques considérées – qui avaient porté sur plus de 6000 patients –, l'équipe arrive à la conclusion que l'ajout d'une composante psychologique à une intervention produit des bénéfices chez cette patientèle. En effet, ce type d'intervention est associée à une réduction de la douleur à court et à moyen terme, ainsi qu'à une amélioration des capacités fonctionnelles à court, à moyen et à long terme.
«En pratique, cela signifie que les interventions qui combinent les dimensions physique et psychologique sont supérieures aux interventions physiques seules lorsqu'elles sont offertes aux “bons” patients, résume le professeur Massé-Alarie. Cela implique qu'il faut adapter les interventions pour les maux de dos au profil de la personne que l'on traite. Par exemple, les physiothérapeutes prescrivent souvent des interventions qui reposent sur des exercices. Si la personne à qui on les prescrit a peur de bouger, il est important d'en tenir compte, en adoptant une approche graduelle qui l'aide à surmonter cette peur.»
— Hugo Massé-Alarie
Le traitement des problèmes d'anxiété et de dépression ne relève pas du champ de compétences des physiothérapeutes, reconnaît le chercheur. «Par contre, pour des problèmes comme la peur de bouger, les physiothérapeutes peuvent adapter les interventions qui relèvent de leur champ de pratique. Il faut mieux les former à reconnaître les facteurs de risques psychologiques afin que leurs interventions tiennent compte de toutes les dimensions de la personne à qui ils prodiguent des soins.»
Les signataires de l'étude parue dans le Journal of Orthopedic & Sports Physical Therapy sont Pouya Rabiei, Catelyn Keough, Philippe Patricio, Claudia Côté-Picard, Amélie Desgagnés et Hugo Massé-Alarie.