30 janvier 2025
Cinq conseils pour intégrer l'intelligence artificielle à son organisation
Avec cinq ans de soutien aux organisations dans le rétroviseur, les professionnels de l'Institut intelligence et données partagent des leçons qu'ils ont acquises
Près des trois quarts des entreprises québécoises ont de la difficulté à identifier les besoins opérationnels auxquels répond l'intelligence artificielle (IA), selon une étude du Conseil du patronat du Québec publiée en décembre 2024. L'Institut intelligence et données (IID) a soutenu 126 entreprises et organisations québécoises pour l'intégration de l'IA au fil de 209 démarches d'accompagnement.
La majorité de ces démarches font l'objet de stages de huit mois réalisés par des étudiantes et étudiants à la maîtrise professionnelle en informatique – intelligence artificielle (MIIA).
«L'équipe a mis en commun ses expériences pour identifier cinq leçons clés – les problèmes les plus fréquemment rencontrés auxquels les entreprises et organisations devraient s'intéresser d'entrée de jeu lorsqu'elles s'intéressent à l'IA», souligne Julien Laumônier, qui assure la coordination de l'équipe scientifique de l'IID.
1. Savoir pourquoi on fait de l'IA
«On voit beaucoup d'entreprises se lancer dans l'IA attirées par les aides financières disponibles, mais sans avoir une vision claire de leurs objectifs. Elles vont là parce qu'elles ont l'impression que c'est important, mais sans savoir ce qu'elles veulent faire avec», explique un autre professionnel de l'IID, Ihsen Hedhli, qui supervise le programme de stages à la MIIA. Selon lui, il est essentiel d'avoir une stratégie claire, pour s'assurer que les projets réalisés – petits ou grands – vont s'insérer harmonieusement dans les processus existants.
2. Avoir des données et les exploiter
«Sans données, impossible de faire de l'IA», lance Pierre Prévot, qui supervise à l'IID les demandes issues d'un autre programme d'accompagnement, le Programme d'aide à la recherche industrielle (PARI) du Conseil national de recherche du Canada. Il explique l'importance d'avoir des données qui soient en mesure de répondre au problème qu'on souhaite résoudre, et qui puissent être exploitées. «Bien souvent, c'est là que le bât blesse: lorsque les données sont disponibles, elles ne sont pas nécessairement bien organisées, structurées – nettoyage, classification, labellisation, organisation.»
3. Éviter les biais
Une autre étape cruciale d'évaluation: éviter les biais potentiels issus des données, qui peuvent affecter les résultats. «Des données biaisées peuvent entraîner des résultats injustes ou discriminatoires, ce qui peut nuire à la crédibilité et à l'efficacité des solutions d'IA. Il faut d'entrée de jeu mettre en place des mécanismes de détection et de correction des données pour garantir l'équité et l'intégrité des modèles qui en sont issus», indique Julien Laumônier.
Les entreprises doivent aussi s'assurer que l'usage prévu pour les données est autorisé sur le plan légal ou éthique. «Surtout lorsqu'on parle d'utilisation secondaire des données: il faut s'assurer qu'on a toutes les permissions nécessaires, sinon le modèle mis au point ne pourra tout bonnement pas être utilisé», ajoute Pierre Prévot.
4. Choisir entre générique ou sur mesure
L'équipe de l'IID invite les entreprises à réfléchir si elles ont réellement besoin de l'IA. «Ça arrive parfois qu'on voie qu'un modèle statistique ou de la programmation classique, par exemple, pourrait faire l'affaire», mentionne Julien Laumônier. «C'est un peu écraser une mouche avec une massue, dans un cas comme celui-là», illustre Pierre Prévot.
Si l'IA est bel et bien nécessaire, il faut choisir entre un modèle générique ou «sur mesure». «Le modèle sur mesure, il est conçu pour une tâche précise, pour une organisation précise – mais il nécessite plus de temps et de ressources pour bien le développer», explique Pierre Prévot.
5. Penser à l'intégration du modèle
Mettre au point un outil d'IA est une chose. L'intégrer aux procédés de l'entreprise en est une autre. «Il faut penser aux suites du projet, à l'interne, pour être en mesure de mobiliser réellement l'innovation réalisée dans le cadre, par exemple, du projet de stage. Intégrer un projet d'IA dans un processus organisationnel, ça nécessite une planification minutieuse et une collaboration étroite entre les équipes techniques et les parties prenantes de l'entreprise», fait valoir Ihsen Hedhli. Cela inclut tant la formation du personnel que l'adaptation des flux de travaux ou encore la mise en place de systèmes de suivi et de maintenance.
L'équipe s'entend pour dire qu'intégrer l'IA au sein de son organisation, peu importe sa taille, est un processus complexe qui nécessite une vision claire, des données exploitables et une intégration réfléchie des modèles conçus. D'où l'importance des démarches d'accompagnement de l'IID. «L'avantage des petits projets, comme ceux que l'on met de l'avant avec la maîtrise professionnelle, c'est que ça permet aux organisations de tester la température de l'eau, de voir les freins et les écueils internes avant d'amorcer des initiatives plus larges qui impliquent plus d'équipes et de ressources», conclut Julien Laumônier.