Il ne faut pas miser sur les bassins de rétention construits aux abords des autoroutes ou dans les nouveaux quartiers résidentiels pour compenser la destruction des milieux humides naturels, mais ces infrastructures pourraient tout de même donner un coup de pouce à la nature. Voilà ce que suggère une étude publiée dans la revue Wetlands par une équipe de l'Université Laval.
«Au cours des dernières années, on a vu augmenter le nombre de bassins de rétention aux abords des routes et dans les nouveaux quartiers résidentiels, signale la responsable de l'étude, Monique Poulin, professeure au Département de phytologie de l'Université Laval et chercheuse au Centre de la science de la biodiversité du Québec. Ces infrastructures servent à recevoir les eaux pluviales afin d'éviter les inondations. Elles n'ont pas été conçues pour ressembler à des habitats humides, mais en raison des conditions qu'on y trouve, des plantes et des animaux typiques des milieux humides peuvent s'y installer. On a voulu savoir dans quelle mesure les communautés végétales qui vivent dans ces bassins ressemblent à celles des milieux humides naturels.»
Pour ce faire, l'équipe de la professeure Poulin a comparé les communautés végétales de 20 bassins de rétention situés aux abords de quatre routes du Québec – la 175 au nord de la ville de Québec, la 85 dans le Témiscouata, la 73 en Beauce et la 367 dans Portneuf – à celles de 20 milieux humides situés à proximité de ces bassins et de 20 milieux humides situés loin des routes.
Les résultats? Lorsque les analyses portent exclusivement sur la partie aquatique de ces milieux, la composition végétale des bassins est très similaire à celle qu'on trouve dans les milieux humides naturels adjacents ou distants de la route. Cette similitude est aussi observée, quoiqu'à un degré moindre, dans la zone qui ceinture la partie aquatique des trois milieux.
«Il existe une diversité végétale intéressante dans les zones aquatiques et riveraines de bassins de rétention, constate la professeure Poulin. Toutefois, ces milieux ne sont pas des habitats naturels et il ne faut pas croire qu'on peut y recourir pour remplacer les milieux humides qui sont détruits lors de la construction de routes ou de quartiers résidentiels. Mais, puisqu'il faut construire ces bassins, aussi bien les aménager pour favoriser l'installation de plantes de milieux humides naturels.»
— Monique Poulin
Les travaux de l'équipe de la professeure Poulin ont d'ailleurs conduit à quelques recommandations destinées au ministère des Transports du Québec, le commanditaire de l'étude. «En créant des rives sinueuses autour de la zone aquatique du bassin plutôt qu'une rive régulière et en diminuant la pente du talus, on augmenterait significativement la superficie sur laquelle les plantes des milieux humides peuvent s'installer, suggère la professeure Poulin. On pourrait aussi utiliser ces milieux comme pépinières pour faire croître des plantes qui pourraient servir dans des projets de restauration de milieux humides.»
Rappelons que plus de 50% de la superficie des milieux humides de la vallée du Saint-Laurent ont été détruits au cours des deux derniers siècles et que les pertes se sont accélérées au cours des dernières décennies.
Les autres signataires de l'étude parue dans Wetlands sont Pierre-Alexandre Bergeron D'Aoust et Mathieu Vaillancourt, de l'Université Laval, et Stéphanie Pellerin, de l'Institut de recherche en biologie végétale de l'Université de Montréal.