Plus de 104 000 arbres poussent sur les terrains municipaux de la ville de Québec. Si on connaît leur nombre et leur état de santé, on ignore tout des arbres sur les terrains privés. Pour remédier à la situation, une équipe de recherche au Département des sciences du bois et de la forêt de l'Université Laval souhaite faire un inventaire participatif avec l'aide des résidentes et des résidents. En plus de récolter des données importantes sur les arbres non répertoriés, les chercheuses veulent comprendre ce qui motive les citoyens à planter des arbres sur leurs terrains.
En ce 22 avril, Jour de la Terre et moment de réflexion sur l'environnement, ULaval nouvelles a posé trois questions à Janani Sivarajah, professeure en sciences du bois et de la forêt et titulaire de la Chaire de recherche sur l'arbre urbain et son milieu.
Pourquoi ce projet est-il important?
Les arbres ont une importance considérable, en particulier dans les zones urbaines, car ils atténuent les îlots de chaleur et améliorent la qualité de l'air. Il est donc essentiel de reconnaître leur rôle central dans les espaces publics et privés. Certaines villes comme Québec, Montréal et Toronto, disposent de données sur les arbres publics, mais il est souvent difficile d'obtenir des informations sur les arbres situés sur les propriétés privées. Dans de nombreuses villes nord-américaines, plus de la moitié de la canopée se trouve pourtant sur des terrains privés, ce qui est le cas à Québec. Avec ce projet d'inventaire participatif, Savannah Bissegger O'Connor, étudiante à la maîtrise en sciences forestières, cherche à combler ce manque de données. Dans cette démarche, elle est codirigée par moi et Anne Bernard, professeure au Département des sciences du bois et de la forêt.
Comment les citoyennes et les citoyens peuvent-ils participer?
Il est possible de s'inscrire dès maintenant pour participer à la collecte des données, qui se fera dès la mi-juin et tout au long de l'été. Notre objectif est d'obtenir des données représentatives de tous les quartiers de la ville de Québec. Les gens pourront contribuer en recueillant des informations sur les arbres de leur propriété dont la circonférence est d'au moins 12,5 cm. Ils devront fournir leur nombre, leur emplacement, leur taille et leur état de santé, ainsi que trois photos de chaque arbre afin de permettre l'identification des espèces.
Nous avons simplifié les étapes de collecte de données pour les rendre accessibles à tous. À l'aide d'une application mobile, il sera possible de saisir les données dans le système et nous les recevrons automatiquement. Des capsules explicatives seront bientôt disponibles sur notre site Internet pour guider les personnes participantes dans le processus.
Une fois que l'équipe aura traité les informations reçues, les citoyennes et citoyens pourront voir leurs arbres sur une carte de la forêt urbaine, qui sera publiée sur notre site Web.
À quoi serviront les données recueillies?
Notamment à constater la diversité des espèces d'arbres à Québec. Le projet s'inspire du travail de la professeure Carly Ziter, de l'Université Concordia, à Montréal. Son équipe a répertorié près de 52 espèces d'arbres additionnelles qui n'étaient pas incluses dans l'inventaire public des arbres de la métropole.
L'étude effectuée à Québec aidera également à identifier les arbres qui peuvent croître en climat nordique, en tenant compte des changements climatiques. Ceci est essentiel pour assurer la résilience de la canopée urbaine face aux menaces telles que les maladies et les insectes ravageurs.
Ces données sur les espèces d'arbres, leur santé et leurs dimensions seront également utiles pour conseiller la Ville de Québec et des partenaires locaux dans leurs politiques de gestion publique. Elles permettront notamment d'identifier les espèces d'arbres à privilégier.
L'étude se veut aussi un levier pour sensibiliser le public à l'importance des arbres. Elle aidera d'ailleurs à comprendre les motivations des gens à en planter sur leur terrain.
Actuellement, le couvert d'arbres à Québec est d'environ 32%, mais la Ville souhaite atteindre un indice moyen de canopée recommandé de 35%, tout comme ailleurs au Canada. Plus de 500 municipalités canadiennes ont déclaré l'urgence climatique, ce qui fait de l'augmentation du couvert d'arbres une priorité. Cependant, cette expansion est souvent limitée dans les espaces publics, d'où l'importance d'impliquer les propriétaires privés. Encourager les initiatives de plantation d'arbres sur les terrains privés peut contribuer de manière significative à la réalisation des objectifs municipaux en matière de canopée urbaine et à l'atténuation des effets des changements climatiques.