La popularité de la Simulation internationale annuelle de l’OTAN à Washington ne se dément pas dans les cercles universitaires. La 39e édition, qui a eu lieu du 14 au 18 février dans la capitale américaine, a attiré environ 250 étudiantes et étudiants d’une vingtaine d’universités, américaines pour la plupart, mais aussi du Canada, de Belgique, de Suède et du Royaume-Uni. Ces participants ont représenté 30 États membres de l’OTAN, une organisation politico-militaire rassemblant des pays de la zone atlantique nord.
Pour la première fois, l’Université Laval a eu à représenter deux États membres, le Royaume-Uni et la Croatie. Forte de 18 membres provenant de trois facultés et de l’École supérieure d’études internationales, cette délégation a vu son équipe Royaume-Uni et son équipe Croatie obtenir pas moins de cinq prix pour la qualité de leur travail. La première équipe a récolté à elle seule quatre distinctions, notamment l’Overall Superior Delegation Award.
«Même s’il n’existe aucun classement, avec ces cinq distinctions, l’Université Laval a fait partie des meilleures délégations de la Simulation», affirme Maxime Philaire, étudiant à la maîtrise en science politique et président sortant d’OTAN Laval, une association créée en 2007. Selon lui, l’équipe Royaume-Uni a particulièrement bien performé. «Les délégués ont très bien défendu les intérêts des deux pays, poursuit-il. Ils ont participé à la rédaction des résolutions. Ils ont pu ressortir du lot, de l’ensemble des parties. Nous avons réussi à nous distinguer dans les discours, dans les négociations avec d’autres délégations, dans chacun des comités.»
Une formation préparatoire exigeante
En septembre 2023, les délégués de l’Université Laval ont entrepris leur formation préparatoire à la Simulation de l’OTAN. Sous la direction de Maxime Philaire et Alice Bonardi-Igout, cette dernière étudiante à la maîtrise en études internationales et vice-présidente sortante d’OTAN Laval, ils se sont familiarisés avec les règles de fonctionnement relatives à la procédure. Ils ont assisté à des présentations sur la politique intérieure des deux pays, leur histoire, leur économie et leurs forces armées. Ils ont aussi participé à deux simulations de l’OTAN sur le campus. Enfin, deux professeurs du Département de science politique, Jonathan Paquin et Anessa Kimball, ont aussi contribué à la préparation des délégués.
«Le Royaume-Uni a une position très médiatrice au sein de l’OTAN, souligne Léa Bossert, déléguée de ce pays et nouvelle présidente de l’association OTAN Laval. Ce pays cofondateur de l’Organisation joue un rôle important dans les négociations, qu’il s’agisse de trouver un accord ou d’encourager toutes les parties à se faire entendre. Dans l’Alliance, ce pays est très proche de la position américaine.»
Pour sa part, Maxime Philaire était l’un des représentants de la Croatie. Selon lui, ce petit pays d’Europe centrale voit l’OTAN comme une alliance primordiale dans sa politique étrangère. «C’est la base de sa sécurité au sein de l’Europe, soutient l’étudiant. Dans le climat géopolitique actuel, la Croatie considère l’OTAN comme la meilleure organisation qui permet d’assurer la sécurité de ses 32 États membres.»
Avant la Simulation, les ambassades
L’événement est organisé conjointement par trois universités américaines et par le Lemnitzer Center for NATO and European Union Studies, avec la collaboration des ambassades, à Washington, des pays membres de l’Organisation.
À leur arrivée dans la capitale américaine, 11 membres de la délégation de l’Université Laval se sont rendus à l’ambassade du Royaume-Unis alors que les 7 autres étaient reçus à l’ambassade de Croatie. Ces réunions préparatoires constituent une procédure normale, à la fois pour les participants à la Simulation et pour les représentants des États membres de l’OTAN.
«De part et d’autre, les diplomates nous sont apparus comme maîtrisant très bien leurs dossiers, raconte Miguel Covino, étudiant au baccalauréat en science politique et nouveau vice-président d’OTAN Laval. Ils étaient au courant des sujets dont on allait discuter dans chacun des comités. Leurs explications étaient complémentaires à ce que nous savions déjà par notre préparation.»
La conférence d’ouverture de la Simulation a été donnée par Curtis Ried, le chef de cabinet et secrétaire exécutif du Conseil national de sécurité de la Maison-Blanche. Celui-ci a abordé, du point de vue américain, les enjeux qui font l’actualité, comme l’Indo-Pacifique et la Chine, l’instabilité au Moyen-Orient et la guerre en Ukraine. Il a aussi parlé des carrières dans le domaine de la sécurité nationale et de la défense. Une période de questions-réponses a suivi le discours.
«La présence d’une personne très haut placée, qui vient faire un discours sur la politique étrangère américaine actuelle et sur l’actualité internationale, est une reconnaissance du sérieux de cette simulation, affirme Maxime Philaire. Cette présence permet aussi aux participants de prendre conscience que l’on discute de réels enjeux et que cette simulation a une vraie profondeur de réflexion. Ce fut très constructif comme conférence.»
Diplomates, ministres ou commandants
La Simulation reflète le déroulement d’une conférence type de l’OTAN. Les étudiants délégués ont joué le rôle de diplomate, de ministre de la Défense ou de commandant des forces armées.
Une des règles de base veut que chaque résolution soit votée à l’unanimité. «Il faut un consensus avec tous, explique Alice Bonardi-Igout. Il faut s’assurer que tous les États membres sont d’accord avec ce que l’on a travaillé. Si un seul n’est pas d’accord, il peut bloquer tout le travail en amont. Il faut s’assurer que tout a été compris par tout le monde et intégré.»
Selon Maxime Philaire, les États membres réussissent toujours à trouver un consensus. «Ce qui est beau, dit-il, est qu’on traite de sujets graves qui touchent beaucoup à la souveraineté des États. Trouver un consensus avec tout le monde dans les résolutions est très très bien parce qu’on a des pays, comme la Hongrie et la Turquie, qui ont souvent des positions réfractaires.»
Les délégués étaient répartis entre six comités. Selon le comité, les échanges ont porté notamment sur l’élargissement de l’OTAN, le soutien politique et pratique à l’Ukraine, le partage du fardeau nucléaire de l’OTAN, la progression de la coopération avec les partenaires de l’Asie-Pacifique ainsi que l’espace, un domaine contesté.
«Le communiqué final est la combinaison de toutes les différentes résolutions adoptées durant la Simulation», indique Maxime Philaire.
Cela dit, le dimanche matin, le Comité militaire s’est réuni pour rédiger une déclaration sur la guerre en Ukraine. «Cette déclaration, poursuit-il, rappelait l’illégitimité de l’invasion russe, le soutien à l’Ukraine dans son droit de se défendre et le rappel que l’OTAN est une alliance forte en raison de son article 5 qui engage chaque État membre à venir en aide si l’un d’entre eux est attaqué.»
Pour l’étudiant, participer à la Simulation de l’OTAN a constitué «une aventure humaine hors du commun» au cours de laquelle les États membres se sont élevés au-dessus de leurs intérêts nationaux pour négocier tous ensemble des ententes satisfaisantes. Pour Léa Bossert, la Simulation fut «une expérience vraiment incroyable» où les participants ont mis en pratique le fruit de cinq mois de préparation. Elle en retient surtout l’esprit de collégialité qui animait l’ensemble des délégués.