
— Films Ariane, ZDF, Neue Constantin Film
Les étudiants Alexis Grenier, Augustin Lévesque-Mongrain et Félix Gélinas adorent regarder, ensemble ou séparément, de grands films d’ici et d’ailleurs. Ils discutent de leurs découvertes et de leurs préférences, passant aussi le contenu des longs métrages au filtre de l’histoire, la discipline dans laquelle ils étudient. L’an dernier, ces amis cinéphiles se sont dit: «Pourquoi ne pas présenter des films sur le campus et partager notre passion pour le cinéma international?». Ainsi est né Ciné-Histoire, une série de rencontres réunissant la projection d’œuvres marquantes du 7e art, une présentation sur l’histoire derrière les films et des discussions ouvertes et amicales.
Le jeudi 9 novembre, Ciné-Histoire tiendra sa troisième soirée de cinéma sur le campus. Consacrée au film classique Le nom de la rose de Jean-Jacques Annaud, cette rencontre sera aussi l’occasion d’en apprendre un peu plus sur l’Inquisition et la vie monastique médiévale grâce à une courte conférence de Didier Méhu, professeur au Département des sciences historiques et spécialiste des rapports entre l’Église et les pratiques sociales pendant le haut Moyen Âge et le Moyen Âge central (du 4e au 12e siècle).
«Il est très enthousiaste à l’idée de présenter et de commenter ce film, qu’il considère comme l’un des plus fidèles à la réalité médiévale», révèle Félix Gélinas à propos du professeur Méhu qui, après une thèse sur l’organisation de l’espace et des rapports sociaux autour de l’abbaye de Cluny entre le 10e et le 15e siècle, a notamment poursuivi des recherches sur les voyages pontificaux des 11e et 12e siècles, l’histoire du monastère de Lérins et les rituels de consécration des lieux et des personnes.
Le nom de la rose, long métrage franco-italo-allemand sorti sur les écrans en 1986, met en scène l’enquête menée en l’an 1327 par un moine franciscain, dans une abbaye bénédictine, sur une série de morts suspectes. Ayant pour trame de fond l’Inquisition, il évoque également les tensions dans l’Église catholique, notamment entre les ordres monastiques et la papauté alors installée à Avignon. Ce film pourra ainsi autant plaire aux historiens qu’aux littéraires passionnés d’Umberto Eco ou aux étudiants en théologie et sciences religieuses.
— Augustin Lévesque Mongrain, étudiant à la maîtrise en histoire
En fait, l’activité gratuite et ouverte à tous souhaite accueillir les cinéphiles les plus accomplis comme les néophytes, les passionnés d’histoire comme les simples curieux avides de découvrir une période méconnue. «Notre but, c’est d’offrir un événement rassembleur pour des gens de toutes disciplines qui ont envie d’élargir leurs horizons cinématographiques, de découvrir différentes époques historiques et de discuter librement de tous les sujets qui peuvent être liés au film présenté», explique Augustin Lévesque-Mongrain.
Large spectre historique
Le 3 octobre, Ciné-Histoire présentait un premier film, Ashes & Diamonds du polonais Andrzej Wajda, qui raconte l’histoire d’un jeune résistant à qui on ordonne, le dernier jour de la Seconde Guerre mondiale, de tuer le nouveau secrétaire du parti communiste, un confrère avec qui il a combattu. «On a profité de ce film pour brosser un portrait historique de la Pologne avant, pendant et après la Seconde Guerre. On a aussi exploré dans quelles conditions ce film a été tourné en 1958», indique Augustin Lévesque-Mongrain.

— KADR
Le 24 octobre, c’était au tour du long métrage Aguirre, la colère de Dieu, réalisé par l’allemand Werner Herzog en 1972, d’être projeté. On y assiste aux déboires d’une expédition espagnole à la convoitise démesurée qui, victime d’une mutinerie, descend l’Amazone en radeau. «Les personnages du film, déclare Félix Gélinas, ont réellement existé. Dans la conférence, il était donc intéressant de raconter la vie de ces vrais conquistadors à la recherche de l’Eldorado et de montrer ce qu’ils représentent dans l’histoire plus large des conquêtes et des expéditions espagnoles. De plus, comme ce film s’inscrit dans la vague du nouveau cinéma allemand, il était aussi important de définir ce courant cinématographique et de le contextualiser dans l’histoire du cinéma.»

— Werner Herzog Filmproduktion
Comment l’équipe a -t-elle choisi les films au programme? «On a débattu entre nous sur la qualité et la pertinence de plusieurs œuvres. On voulait des films vraisemblables d’un point de vue historique et on souhaitait aussi offrir un vaste panorama pour toucher le plus large public possible. On a donc sélectionné des films réalisés à diverses époques et portant sur des périodes historiques différentes», répond Félix Gélinas. «On s’est aussi donné pour mission de valoriser le cinéma international et de ne pas se cantonner aux grandes productions d’Hollywood», renchérit Alexis Grenier.
La pucelle au bûcher
Présenté le mardi 28 novembre, le dernier film prévu cet automne, La passion de Jeanne d’Arc, date de 1928. Cette œuvre du cinéaste Carl Theodor Dreyer, produite en France mais projetée pour la première fois au Danemark, déconcerte par sa facture peu commune. Initialement conçue pour être un film parlant, l’œuvre est finalement muette pour des raisons techniques, mais adopte tout de même les codes du parlant. «Le film a un parcours très intéressant. Censuré à sa sortie, il a longtemps été présenté dans des versions éditées. Ce n’est qu’au début des années 80 qu’on a retrouvé une version originale en Norvège. En plus de l’histoire du film lui-même, la conférence s’intéressera également au contexte historique dans lequel s’inscrit le scénario, soit la guerre de Cent Ans et l’Inquisition. On présentera aussi bien sûr la figure mythique qu’est Jeanne d’Arc, sa vie et son procès», annonce Alexis Grenier.

— Société générale des films
Les trois étudiants à la maîtrise en histoire à l’origine du projet souhaitent ardemment le retour de Ciné-Histoire pendant la session d’hiver. Ils songent actuellement aux prochains monuments du cinéma qui pourraient être présentés. Peut-être un film québécois, dit l’un. Peut-être un documentaire, ajoute un autre. D’ailleurs, tous trois trouveraient fort enrichissant de collaborer avec des étudiants en cinéma, en sciences politiques, en sociologie ou dans d’autres disciplines qui pourraient apporter une vision différente au projet. «Nous sommes très ouverts à accueillir toutes les personnes qui désireraient s’impliquer avec nous dans Ciné-Histoire», conclut Alexis Grenier. Avis aux intéressés…
Prochaines activités de Ciné-Histoire:
Le nom de la rose de Jean-Jacques Annaud (1986), le jeudi 9 novembre à 19h
La passion de Jeanne d'Arc de Carl Theodor Dreyer (1928), le mardi 28 novembre à 19h
Les projections, précédées d'une conférence et suivies d'une discussion, ont lieu au local 1630 du pavillon Louis-Jacques-Casault. Ces activités sont gratuites et ouvertes à tous.