
Sept des étudiants membres du GAUL ont participé, fin août, à la compétition Launch Canada, à Timmins. De gauche à droite: Justin Binette, Jérémy Moreau, Mathieu Marquis, Laurent Beardsell, Lou Cloutier, Alexander Monsalve et Émile Blais. Les trois derniers tiennent dans leurs bras une section de la fusée.
«Notre seul but était de faire voler la fusée. Nous avons réussi. Dans nos cœurs, nous sommes premiers de la compétition.»
Lou Cloutier est en première année du baccalauréat en génie physique. Il fait partie du Groupe aérospatial de l’Université Laval (GAUL), une organisation étudiante vouée à la conception et la fabrication de fusées amateurs. Comme une vingtaine d’autres étudiants, principalement inscrits en génie physique et en génie mécanique, il a consacré beaucoup de temps et d’énergie, cette année, au projet de fusée supersonique Nebula.
Le 30 août dernier à 19:00:38, dans le cadre de Launch Canada, un concours interuniversitaire pancanadien de lancer de fusées qui se déroulait à Timmins en Ontario, l’engin du GAUL s’est arraché à l’attraction terrestre sous les cris et les encouragements d’une trentaine d’étudiants en ingénierie provenant de diverses universités, puis a filé à travers le ciel bleu à la vitesse époustouflante de 1,15 Mach, soit 391 mètres par seconde, une vitesse supérieure à celle du son. Après avoir brûlé ses 4,4 kilos de carburant en 2,9 secondes, la fusée a poursuivi sa trajectoire balistique jusqu’à l’altitude de 3287 mètres. Puis elle a amorcé sa descente soutenue par deux parachutes. Elle a été récupérée intacte. En tout et pour tout, depuis le décollage jusqu’à l’atterrissage, le vol a duré environ 3 minutes 30 secondes.
«L'équipe du GAUL au complet était novice dans la fabrication de fusées amateurs, indique Lou Cloutier. C'est donc un très grand accomplissement pour nous. Bien évidemment, nous avons ressenti une grande fierté et une énorme joie face à ce que nous avons accompli. Il y avait un grand esprit de fraternité parmi les sept membres de notre équipe. Nous avons aussi ressenti cet esprit avec les autres équipes.»
Justin Binette est inscrit au microprogramme de formation en ingénierie en milieu pratique 2 – génie physique et directeur technique du projet Nebula. «Cela faisait quatre ans que le GAUL n’avait pas participé à un lancer de fusées, souligne-t-il. Voir une fusée du GAUL enfin décoller a été très satisfaisant. Voir les parachutes s’ouvrir de façon optimale a aussi été très impressionnant, considérant le fait que plusieurs des 18 équipes à la compétition ont eu des problèmes avec leurs parachutes.»
Une septième fusée haute puissance depuis 2012
Nebula est la septième fusée haute puissance du GAUL depuis 2012. Elle mesure 2,7 mètres de hauteur et son diamètre atteint 13,9 centimètres. Au décollage, son poids était de 24 kilos. Sa structure est principalement faite de fibre de carbone et de fibre de verre. Les pièces devant supporter les charges du moteur et des parachutes sont faites d’aluminium.
«Nous avons fait peu de travail en laboratoire, explique Justin Binette. Cependant, nous avons fait plusieurs tests sur le terrain à Timmins. Par exemple, nous avons effectué des essais pour connaître la quantité d’explosif nécessaire au déploiement des parachutes.»
Cette année, la question des parachutes revêtait une importance particulière aux yeux du GAUL. En 2019, année du lancer, au Nouveau-Mexique, de la précédente fusée du groupe, une faiblesse est apparue durant l’ascension au niveau du nez de l’engin. Ce problème a aussitôt entraîné la séparation de cette partie du reste de la fusée. Pendant que le nez redescendait soutenu par les parachutes, la fusée a poursuivi sa course. Au terme de celle-ci, l'engin est retombé au sol où il s’est écrasé.
«Nous avons demandé beaucoup de conseils à d’autres clubs d’aérospatial universitaire au Québec, raconte Lou Cloutier. Nous avons développé une nouvelle technique pour le nez. Elle consiste en gros en une seule pièce plutôt que deux pièces collées ensemble. Cela a super bien marché au final.»
Aérostructure et avionique
Au fil des mois, les membres du GAUL ont conçu et assemblé la plupart des pièces de Nebula. Le moteur a été acheté sur le marché commercial ainsi que les deux altimètres. Certains étudiants se sont consacrés au design et à la fabrication du fuselage, des ailerons, de la baie avionique et du système de déploiement des parachutes. D’autres étudiants étaient responsables de la conception et de la fabrication d’un système d’acquisition des données du vol et des tests au sol.
«Nous avons conçu et assemblé 90% des pièces de la fusée, indique Justin Binette. Nous avons fait usiner des pièces par des techniciens du Département de génie électrique. Assembler les pièces et ensuite les faire fonctionner les unes avec les autres a demandé beaucoup de temps. Nous avons aussi reçu l’aide d’anciens membres du GAUL. Des membres d’autres clubs d’aérospatial universitaire au Québec nous ont donné beaucoup de conseils.»
La fusée Nebula a nécessité l’attention des étudiants quasiment jusqu’à la dernière minute précédant le lancement. Des problèmes d’avionique et de télémétrie sont apparus. De plus, les deux caméras fixées sur l’engin ont cessé de fonctionner.
« Nous avons dû démonter l’avionique d’urgence, explique Lou Cloutier. Nous avons récupéré les modules un par un sur le circuit imprimé que nous avions conçu à 100%. On les a branchés manuellement sur un microcontrôleur. Au final, nous avons réussi à régler le problème. La solution n’était ni élégante, ni idéale. Mais elle a fonctionné.»
Le classement final de la compétition Launch Canada 2023 devrait être connu bientôt. «Nous avons eu un très bon vol, soutient-il. Mais parce que notre électronique était relativement simple, on ne s’attend pas à être premiers.»
Voir une vidéo du lancement de Nebula:

Des membres du GAUL insèrent la baie avionique dans la fusée, soit la partie comprenant tous les composants électroniques.

Des étudiants font l’installation de la fusée Nebula sur la rampe de lancement.