Arrivée en janvier 2022 à l'Université Laval pour son doctorat en médecine moléculaire, Véronique Boumtjé s'est jointe à l'équipe du professeur Yohan Bossé, au sein d'un projet qui pourrait permettre d'améliorer les critères de sélection des personnes à haut risque de cancer du poumon lors des programmes de dépistage. L'étudiante, qui a reçu une bourse d'études supérieures du Canada Vanier, poursuit sa quête pour offrir une prise en charge plus efficace aux patients.
«Le cancer du poumon est la principale cause de décès par cancer dans le monde, ses statistiques sont supérieures à celles des cancers du sein, de la prostate et du colon réunis. Par ailleurs, la survie des patients après 5 ans ne s'est que marginalement améliorée au cours des dernières décennies, à cause du retard diagnostic de cette pathologie», expose la boursière qui s'est démarquée par l'excellence de son dossier, son potentiel de recherche et son leadership.
L'objectif du projet sur lequel elle travaille est de mettre en place une solution innovante pour diagnostiquer le cancer du poumon. Elle indique qu'à partir d'une prise de sang et des analyses réalisées grâce à la bio-informatique, l'équipe de recherche s'intéresse aux nodules pulmonaires indéterminés et tente d'établir, d'après l'information génétique, la probabilité de développer ou non un cancer selon le score de risque polygénique.
L'idée est d'intervenir le plus tôt possible chez les personnes qui n'ont pas de symptômes. «Le cancer du poumon est très agressif et peut évoluer très rapidement», souligne Véronique Boumtjé.
L'étudiante apprécie les ressources mises à sa disposition aux centres de recherche affiliés à l'Université Laval, comme l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec (IUCPQ), où le professeur Bossé a son laboratoire. «C'est l'un des rares centres de recherche translationnelle», dit-elle en expliquant qu'il est possible d'appliquer les résultats de leurs travaux dans un contexte clinique, donc d'avoir des retombées sur le terrain.
Véronique Boumtjé applaudit aussi la collaboration entre les chercheurs de différents domaines. «Le projet sur lequel je travaille est très multidisciplinaire et implique des pathologistes, des bio-informaticiens, des radiologistes, des cliniciens et des spécialistes de la génomique qui ont décidé de réunir leurs connaissances pour le bien-être des patients. L'IUCPQ dispose également d'une biobanque, qui a permis de collecter plus de 4000 tissus de patients opérés pour un cancer du poumon au cours des deux dernières décennies. Il s'agit d'une base de données exceptionnelle dans le domaine de la recherche et je suis bénie d'y avoir accès dans le cadre de ce projet.»
Curiosité de longue date
L'étudiante boursière explique que c'est la curiosité qui l'a poussée vers la recherche médicale, un intérêt qu'elle cultive depuis l'enfance. «Le fait que nous ne puissions pas savoir quelle est l'origine des cancers m'a toujours intriguée. Le cancer du poumon, comme d'autres cancers, est une maladie multifactorielle impliquant aussi bien les facteurs génétiques que les facteurs environnementaux, mais ces facteurs ne sont pas à 100% des facteurs de causalité.»
Cette volonté de participer à l'effort mondial et collectif pour comprendre le cancer et trouver des solutions l'a d'abord menée à la faculté de médecine et de science pharmaceutique de l'Université de Douala, au Cameroun, son pays natal.
Elle y a étudié l'utilité du frottis sanguin pour le diagnostic précoce du cancer hématologique (cancer du sang) chez les enfants de 0 à 10 ans. Ses résultats ont montré que plusieurs cas de cancer étaient restés non identifiés faute de dispositif médical adapté et d'experts. «Je me suis dit: il faut faire quelque chose!»
La jeune chercheuse a ainsi lancé un projet entrepreneurial, Cytoh Improves Health, en travaillant avec des développeurs Web et en utilisant l'intelligence artificielle pour concevoir un prototype de diagnostic précoce des cancers hématologiques.
«Je suis intéressée par tous les cancers», répète-t-elle, par ailleurs, en entrevue. L'appel de la recherche s'est fait sentir et en fouillant sur Internet, elle est tombée sur les publications du professeur Bossé. Elle a eu envie de poursuivre sa mission à l'Université Laval.
La bourse Vanier qu'elle vient d'obtenir lui fait chaud au cœur. «Que ma contribution à la recherche soit reconnue par un programme aussi prestigieux est pour moi une grande fierté. Cela m'encourage à aller plus loin et à m'impliquer encore plus pour le bien des patients», indique Véronique Boumtjé qui compte consacrer sa vie à l'étude du cancer.
Les 6 autres lauréats d’une bourse d'études supérieures du Canada Vanier 2023 pour l'Université Laval sont Patient Mpunga Biayi (doctorat en droit), Marie-Laurence Raby (doctorat en histoire), Karim Bouzid (doctorat en génie électrique), Ayesha Siddika (doctorat en médecine moléculaire), Camille Martini (doctorat en droit) et Véronique Nault (doctorat en sciences de l'administration).
Nicolas Delsol (stage postdoctoral au Département des sciences historiques) a, pour sa part, obtenu une bourse Banting 2023 pour l'Université Laval.