La COVID-19 n'a pas frappé au hasard dans la grande région de Québec. Les ménages qui habitent des secteurs densément peuplés et défavorisés sur le plan socioéconomique ont été plus durement touchés lors des premières vagues de la pandémie, rapporte une équipe de recherche de l'Université Laval et de la Direction de la santé publique du CIUSSS de la Capitale-Nationale dans une étude publiée par la revue BMC Public Health.
L'équipe de recherche arrive à ces conclusions après avoir mis en parallèle des données de Statistique Canada récoltées lors du recensement de 2016 et des données sur l'incidence cumulative des cas de COVID-19 entre mars 2020 et novembre 2021 dans 1206 secteurs de la ville de Québec et des MRC environnantes.
Les cartes qui résultent de ces analyses montrent une hétérogénéité spatiale relativement élevée entre les quartiers de la ville de Québec de même qu'entre les secteurs de la Capitale-Nationale situés au nord du fleuve. Les secteurs les plus touchés sont situés dans les quartiers centraux de Québec.
«L'association entre les disparités socioéconomiques et l'incidence cumulative de la COVID-19 était observable dès la première vague de la pandémie, et elle s'est accentuée lors des vagues subséquentes», signale le responsable de l'étude, Slim Haddad, de la Faculté de médecine de l'Université Laval, du Centre de recherche en santé durable VITAM et de la Direction de la santé publique du CIUSSS de la Capitale-Nationale.
Selon les analyses des chercheurs, les populations désavantagées sur le plan socioéconomique couraient 3,6 fois plus de risques de résider dans les secteurs où l'incidence cumulative des cas de COVID-19 était élevée. À l'inverse, les populations ayant les plus hauts revenus étaient deux fois moins à risque de résider dans des secteurs durement frappés par la pandémie.
«Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette association, avance la première auteure de l'étude, Gabrielle Lefebvre, de la Direction de la santé publique du CIUSSS de la Capitale-Nationale. Les personnes désavantagées sur le plan socioéconomique occupent plus souvent des emplois essentiels, par exemple préposés aux bénéficiaires ou employés dans des magasins d'alimentation, qui augmentent leur risque d'exposition à la COVID-19 ou qui limitent leur capacité de se protéger de la maladie. De plus, les quartiers où se concentrent les personnes défavorisées sont plus densément peuplés et les logements comptent plus d'occupants, ce qui favorise la contagion.»
«Contrairement à ce que certains ont laissé entendre pendant la pandémie, la COVID-19 n'est pas un grand démocrate qui frappe sans égard à la situation socioéconomique des gens, commente Slim Haddad. La pandémie a plutôt amplifié les disparités sociales en santé en touchant davantage les pauvres, les immigrants, les minorités et les personnes plus vulnérables en raison de leur santé ou de leur statut social. Il faudra tenir compte de ces disparités et de ces vulnérabilités dans les interventions en santé publique si une nouvelle vague de COVID-19 ou une autre pandémie devait se produire.»
Les autres auteurs de l'étude parue dans BMC Public Health sont Mélanie Saint-Onge et André Dontigny, de la Direction de la santé publique du CIUSSS de la Capitale-Nationale, et Dominique Moncion-Groulx, étudiant au Département de géographie de l'Université Laval.