Naïla Bouadi avait 10 ans quand ses problèmes d’acné ont commencé et 22 ans quand un traitement sous prescription à l'isotrétinoïne les a réglés. Entre les deux, elle a cherché de l’information sur les réseaux sociaux, mis du citron sur son visage, écouté les mille et un conseils de ses parents et amis, de l’esthéticienne, de la vendeuse de cosmétiques, essayé une panoplie de produits qui lui ont parfois provoqué des réactions.
«L’adolescence est une période de grande vulnérabilité, ce qui fait en sorte qu’on veut croire qu’il y a une solution miracle, mais au final, on est juste plus exaspéré. On se rend compte que rien n’aide et on ne comprend pas pourquoi on ne peut pas avoir une belle peau comme celle des vedettes sur les affiches», lance l’étudiante en troisième année de médecine.
Consulter un spécialiste a changé sa vie. C’est d’ailleurs en sortant de chez un dermatologue, et en réalisant tout le temps perdu à chercher des solutions ailleurs et à dépenser de l’argent pour rien, que l’idée de son projet Dans ma peau lui est venue. Son objectif : lutter contre la désinformation et sensibiliser les adolescents à la santé de la peau.
Des conférences à travers la province
Cette année, son projet a réuni une cinquantaine d’étudiantes et d’étudiants en médecine qui ont offert bénévolement des conférences à un millier d’élèves des écoles primaires et secondaires à travers la province de Québec. D’une diapositive à l’autre, on découvre les différentes formes, les causes et les traitements, s’ils existent, des pathologies cutanées les plus courantes. On y aborde l’acné, qui touche environ 90% des adolescents, l’eczéma, le vitiligo, le psoriasis et l’alopécie tractionnelle, une perte de cheveux due à une friction importante.
«On voulait informer les jeunes et normaliser certaines pathologies comme le vitiligo, qui affecte 1% à 2% de la population en générale, souligne Naïla Bouadi en parlant de cette affectation caractérisée par une perte localisée de la pigmentation, asymptomatique et non dangereuse pour la santé. On montre des mannequins qui ont le vitiligo pour démontrer qu’il y a une force derrière cette différence, que c’est quelque chose dont il ne faut pas avoir honte.»
La présentation orale offerte aux élèves est aussi ponctuée de mises en garde contre les campagnes publicitaires mensongères, les dangers d’Instagram et des influenceurs et elle déboulonne au passage quelques mythes sur les produits naturels. «On veut les rassurer et démystifier tout ce qu’ils voient sur les médias sociaux, leur dire qu’ils n’ont pas à se comparer à des images retouchées, parce que même les célébrités ne ressemblent pas à ça», insiste l’instigatrice du projet, qui a recruté trois consœurs en médecine pour l’aider à déployer Dans ma peau.
Un contenu approuvé par une dermatologue
Le contenu de la conférence, et de la brochure remise ensuite, a été approuvé par une dermatologue pédiatrique, précise Naïla Bouadi. Le projet a été présenté dans toutes les facultés de médecine pour recruter des étudiants qui vont dans les écoles localement. Elle souligne que ces étudiants conférenciers tirent aussi parti de toutes ces informations, puisqu’une infime partie du cursus de base en médecine est consacrée à la santé de la peau. «C’est un avantage de pouvoir revoir ces pathologies, surtout l’acné, qui fait partie des problèmes les plus exposés aux médecins de famille.»
Dans ma peau a été lauréat dans les catégories Exclamation et Projet parascolaire au récent Gala de la vie étudiante de l’Université Laval. Avec les bourses reçues, Naïla Bouadi aimerait développer un site Web pour faciliter l’échange avec les écoles et un compte Instagram avec des dermatologues et des résidents en dermatologie pour devenir une référence en la matière sur les réseaux sociaux. «On va continuer de donner des conférences dans les écoles, mais ce ne sont pas tous les élèves qui vont y assister. L’objectif est de rendre ce contenu plus accessible, que les jeunes puissent au moins avoir l’information sur leur téléphone.»
Devant les listes d’attente pour voir un médecin et ensuite avoir une consultation en dermatologie, il est important, selon elle, d’offrir de l’information fiable, crédible et gratuite. Le projet Dans ma peau est d’ailleurs en nomination pour le Prix de l’éducation publique de l’Association canadienne de dermatologie.
Beaucoup d’adolescents vivent leurs problèmes de peau avec cette impression d’être tout seul, mentionne l’étudiante en médecine. «Même quand on veut chercher de l’aide, on a peur de paraître trop superficiel. Les maladies de peau, ce n’est pas toujours reconnu, comparativement à une maladie qui touche un organe interne, par exemple, où l’entourage aura souvent plus tendance à encourager la personne à consulter.» Au final, la décision de voir un spécialiste revient à chacun, dit-elle, selon les besoins et le niveau de confort.
Naïla Bouadi a encore un conseil : été comme hiver, nous devrions appliquer un écran solaire. «C’est vraiment très important et ça aide à contrôler la plupart des maladies de peau, comme l’acné. Ça prévient les taches brunes causées par l'hyperpigmentation. Donc ne jamais négliger la crème solaire, ça ne peut qu’aider.»
Pour joindre l’équipe du projet Dans ma peau : dmp.ifmsa@gmail.com