
— Getty Images/Gorodenkoff
Une intervention visant à soulager la détresse respiratoire aigüe chez les personnes en fin de vie est administrée de façon non conforme aux recommandations dans près de la moitié des cas. C'est ce que révèle une étude publiée dans la revue L'infirmière clinicienne par une équipe de la Faculté des sciences infirmières de l'Université Laval et du Centre de recherche de l'Institut de cardiologie et de pneumologie de Québec – Université Laval.
L'équipe dirigée par la professeure Diane Tapp a passé en revue 488 dossiers de patients âgés qui avaient été soignés dans six unités de soins de la grande région de Québec. Les chercheuses ont porté leur attention sur les personnes pour lesquelles le personnel soignant avait eu recours au protocole de détresse respiratoire.
«Ce protocole consiste à administrer simultanément un opioïde, un sédatif et un anticholinergique pour induire très rapidement une sédation et pour diminuer les sécrétions respiratoires qui entravent la respiration, explique Diane Tapp. L'Institut national d'excellence en santé et services sociaux (INESSS) considère ce protocole comme une mesure d'urgence et de dernier recours. On parle ici de doses élevées de médicaments administrées à des personnes très fragiles. L'INESSS a d'ailleurs émis des recommandations précises sur les conditions qui doivent être remplies pour justifier son utilisation.»
L'analyse des 488 dossiers a révélé que le protocole de détresse respiratoire avait été appliqué à 78 patients, dans certains cas plus d'une fois (127 fois au total). Dans 50% des cas, l'intervention ne répondait pas aux critères énoncés par l'INESSS. Son recours n'était pas fondé parce que le tableau clinique du patient ne l'exigeait pas (47% des cas) ou que le patient était inconscient (13%).
— Diane Tapp, au sujet du protocole de détresse respiratoire
«Le protocole de détresse respiratoire en soins de fin de vie est une intervention qui n'est utilisée nulle part ailleurs dans le monde, souligne la professeure Tapp. Il est préoccupant de constater que cette pratique n'est ni balisée, ni monitorée et que son recours varie beaucoup d'un milieu de soins à un autre.»
Il y a maintenant plus de 40 ans que le protocole de détresse respiratoire est utilisé au Québec. «Il est temps de réexaminer cette pratique à la lumière des données probantes afin de limiter son usage aux cas où elle est véritablement utile, estime la professeure Tapp. Nous savons que lorsque les milieux de soins en fin de vie disposent des ressources suffisantes pour bien soigner les patients, la nécessité de recourir au protocole de détresse respiratoire diminue énormément.»
L'étude parue dans L'infirmière clinicienne est signée par Diane Tapp, Marie-Ève Cimon, Florence Martineau, Laurie Plamondon, Abba Fadimatou et Ariane Plaisance.