Au mois de mai, 11 étudiantes et étudiants inscrits aux cycles supérieurs en aménagement du territoire et développement régional (ATDR) ou en génie des eaux, ont séjourné 13 jours dans la Cordillère des Andes, plus précisément en Colombie, dans la région nord de l’Amérique du Sud. Pour ce voyage d’études, ces étudiants à la maîtrise ou au doctorat et stagiaires postdoctoraux étaient accompagnés des professeurs Manuel Rodriguez, de l’École supérieure en ATDR, Geneviève Pelletier, du Département de génie civil et de génie des eaux, François Proulx, de l’École supérieure en ATDR et Caetano Dorea, du Département de génie civil à l’Université de Victoria. Étudiants comme enseignants sont tous membres de la Chaire de recherche industrielle CRSNG Gestion et surveillance de la qualité de l’eau potable de l’Université Laval, que dirige le professeur Rodriguez.
Ce projet a été réalisé dans le cadre d’une entente de collaboration avec l’Universidad cooperativa de Colombia (UCC). Son financement était assuré notamment par le ministère des Relations internationales et de la Francophonie du Québec.
«J’ai eu l’idée de ce voyage d’études avec des chercheurs de l’UCC qui travaillent eux aussi sur la protection des sources d’eau potable, explique Manuel Rodriguez. Ils nous ont accueillis et été nos hôtes dans leur ville d’Ibagué pendant une partie du séjour. Le but du voyage était de sensibiliser les membres de la Chaire aux enjeux de la protection des sources d’eau potable dans les montagnes d’un pays en développement comme la Colombie. Nous avons visité plusieurs sites de sources d’eau potable situées à des altitudes variant de 200 à 3800 mètres, représentant des écosystèmes uniques au monde: du mythique fleuve Magdalena jusqu’à l’exceptionnel système de páramo. Un exercice d’acquisition de connaissances et de sensibilisation réussi pour le groupe.»
Une météo changeante
La météo est très changeante dans cette partie du monde. Il peut pleuvoir le matin et faire un soleil resplendissant en après-midi. La température peut être très élevée lorsqu’il fait soleil et devenir très fraîche dès que le temps s’ennuage. «Nous avons passé des journées à une température de 10 degrés Celsius et le lendemain, on était à 40 degrés, raconte le professeur. On peut atteindre ces différences en seulement une heure et demie de route. Ce qui est unique aussi à cause des montagnes, c’est qu’en 100 kilomètres de déplacement, on peut voir tous les étages thermiques possibles, soit toutes sortes d’écosystèmes avec des végétations extrêmement différentes, du páramo, une formation végétale en altitude, jusqu’à des végétations tropicales avec arbres fruitiers, comme les orangers, les citronniers et les manguiers ainsi que les caféiers.»
Un des points forts du voyage a été la visite du fleuve Magdalena, un immense cours d’eau de plus de 1500 kilomètres qui traverse le pays du sud au nord avant de se jeter dans la mer des Caraïbes. «Ce fleuve reçoit des eaux très polluées venant de ses affluents, mais il s’autoépure, souligne Manuel Rodriguez. Les municipalités, elles, doivent prendre l’eau en amont ou très en aval lorsque la pollution s’est dissipée.»
Trois sites ont particulièrement impressionné le groupe. D’abord, la prise d’eau du fleuve Magdalena située à 200 mètres d’altitude. Ensuite, la prise d’eau, à une altitude de 4000 mètres, de la rivière Bogotá, un affluent du fleuve Magdalena.
«Cette eau, dit-il, est d’une qualité exceptionnelle parce qu’il n’y a pas d’activité économique dans ce parc naturel protégé.»
Enfin, la source d’eau de la rivière Ibagué. Cette eau vient des montagnes situées dans un canyon très abrupt. Lorsqu’il pleut beaucoup, il y a de l’érosion des sédiments.
«La turbidité, poursuit-il, est parfois si élevée que les autorités ne peuvent plus traiter l’eau. Elles doivent fermer la prise d’eau et la ville se trouve parfois deux ou trois jours sans eau. Lorsque nous étions sur place, c’était la période des pluies. Nous avons vu la rivière couler à une grande vitesse. Mais il n’y avait pas trop de turbidité et l’usine de traitement était ouverte. Il y a, à cet endroit, deux ou trois coupures d’eau potable chaque année.»
Une belle ouverture
Selon le professeur, les étudiantes et les étudiants ont démontré une belle ouverture à des problématiques très différentes de celles que l’on peut voir au Québec ou à celles qu’ils étudient, par exemple dans le cadre de leur thèse. «Ce voyage, soutient-il, leur a fait voir d’autres problèmes et d’autres types de solutions associés à des milieux vulnérables, une vulnérabilité amenée autant par le relief montagneux que par les milieux socioéconomiques défavorisés. Ils n’ont pas les moyens que nous avons au Nord pour protéger une source d’eau potable. Ils n’ont pas la réglementation qui oblige d’avoir des infrastructures de traitement ou des opérateurs qui puissent assurer la qualité de l’eau depuis la source jusqu’au robinet.»
Manuel Rodriguez est Colombien d’origine. Il a eu plaisir à faire connaître son pays à ses collègues et étudiants. «Pour moi, aussi il y a eu des apprentissages, indique-t-il. J’ai visité des lieux que je ne connaissais pas. Je n’avais pas vu le système de páramo. Ce fut une grande surprise. La végétation de ce système en altitude est particulière. Elle garde l’eau de pluie.»
Les étudiantes et les étudiants sont revenus enchantés de leur périple sur le continent sud-américain. Ils ont notamment trouvé le fleuve Magdalena incroyable. Le professeur qualifie leur apprentissage d’unique et de réussite, mêlant acquisition de connaissances et sensibilisation. Le groupe a fait des excursions dans une nature grandiose et visité des usines de traitement des eaux. Ils se sont initiés à la culture locale, en particulier à la nourriture. Les étudiantes et les étudiants ont aussi donné des conférences publiques sur leurs sujets de recherche, certains l’ont fait en espagnol, d’autres en anglais. Enfin, il y a eu un transfert de connaissances avec des universitaires de là-bas. D’ici la fin août, un rapport de mission sera rédigé par les étudiantes et les étudiants et le professeur Rodriguez.